Philo Decrypte
L'actualité avec philosophie
Politique, culture, économie...
Philppe Brunet-Lecomte, journaliste, commente l'actualité.
Textes mis en ligne sur Facebook ou Linkedin.
Et des podcasts, quelques minutes
avec un peu de recul et d'humour

Réservé aux lyonnais. Tête à tête discret entre le maire écolo de Lyon, Grégory Doucet et l’ancien président de l’OL, Jean-Michel Aulas qui devraient s’affronter aux prochaines élections municipales.
Pas si discret que ça puisqu’un salopard de journaliste enregistrait
cet échange. Délire ? Evidemment.
Même si on sait que le délire habille parfois la vérité.
Aulas : T’as vu le sondage, Doucet ? Je suis en tête pour les municipales.
Doucet : Mais enfin président, je suis 5 points devant vous
- Tu vas pas chipoter pour 5 points
- Mais ça veut dire que je vais gagner, président…
- T’emballe pas, les Verts je les ai toujours battus !
- Vous avez quand même quelques casseroles, va falloir gérer ça !
- Mais pas de cuisine sans casseroles. Y compris en politique. Surtout à Lyon !
- Vous n’avez pas peur d’un concert de casseroles si vous être candidat ? Par exemple le Grand Stade, comment vous l’avez décroché ? Pas clair non ?
- T’as une preuve ?
- Vous voulez que je lâche mon pote Etienne Tête ? Vous vous souvenez, quand il mord ça fait mal…
- Mais c’est un vieux clébard aujourd’hui, pas sûr qu’il puisse encore aboyer !
- Et vous président bientôt 85 ans…
- T’inquiète j’ai un pote à la préfecture qui m’a mis 10 ans de moins sur mon passeport !
- Pas tout jeune quand même
- Mais qui vote, gamin ? Les vieux ! Crois-moi c’est plié tu peux prendre ton vélo et partir en vacances.
- Pas sûr que les vieux votent pour vous surtout si vous faites votre équipe municipale comme à l’OL avec des black et des beurs
- En plus d’être écolo t’es raciste ?
- Mais non, je suis de gauche…
- Et moi je suis écolo parce que j’ai passé ma vie sur les pelouses ! Mais tu me donnes une idée : je vais faire une liste avec des black et des beurs, comme Mélenchon. Avec mes potes footeux. Quand ils sont milliardaires, tout le monde les adorent. Tu vas voir le prochain sondage, je passerai devant toi !
- Facile, c’est vous qui payez les sondages !
- T’as raison c’est plus sûr mais ça coûte plus cher quand on trafique les résultats
- Votre première décision quand vous serez élu ?
- Augmenter le salaire du maire de Lyon
- Mais ça va faire un scandale !
- Je m’en fous je serai élu
- Le fric ça vous obsède…
- Comme tout le monde. La différence c’est que moi je suis riche…
- Ça c’est sûr, vendre l’OL près d’un milliard alors que vous l’avez acheté 10 centimes d’euros…
Sans compter les dessous de table !
- Dessous de table, c’est pas mon genre
- Pourtant il parait que vous aimez bien les paradis fiscaux…
- Fake news, y a un média qui a osé, procès !
- En plus vous êtes pas très net avec les filles…
- Tu parles des call girls à l’OL ? Procès !
- Mais non, je parle de votre nouvelle femme un peu jeune quand même…
- Procès !
- Encore ?
- Oui chaque fois qu’il y a en un qui ose l’ouvrir à Lyon, je lui fais un procès. Et ça marche, les lyonnais sont trouillards !
- Vous avez de la chance que personne vous entende, président !
- En ce moment je leur fous tellement la trouille qu’ils me font tous des turluttes à gauche comme à droite. Noir, Képénékian… Même toi, Collomb tu me soutiens
- Mais vous avez perdu la mémoire, président
- Tu t’appelles pas Collomb ?
- Non moi c’est Doucet Grégory
- Tu cherches à m’enfumer Gérard comme d’habitude ?
- Bon passons, à part augmenter votre salaire, c’est quoi vos priorités ?
- Supprimer les rues piétonnes, les pistes cyclables, les voies de bus, fin des limitations de vitesse, stationnement gratuit partout…
- Vous construisez aussi deux autoroutes sur les quais du Rhône et de la Saône ?
- Super idée Grégory, tu vois quand tu fais un effort. Allez je te prends comme adjoint au blabla !
Et si on faisait liste commune ? Faut que j’en parle à Tapie !
- C’est votre modèle en politique ?
- C’est lui qui m’a conseillé d’acheter l’OL. Une sacrée bonne affaire en plus je me suis bien marré. A l’époque, il m’avait dit : après tu rachètes la mairie…
- En tout cas la politique ça lui a pas réussi, il a fini en prison
- Mais moi, je suis blanc comme neige
- Ah j’ai compris pourquoi à Lyon on vous a surnommé le menteur
- Et t’as aussi compris que mentir en politique c’est le minimum pour réussir ? Regarde Trump !
Le duo municipal a démenti avec vigueur s’être rencontré.
En accusant l’intelligence artificielle d’avoir fabriqué cet échange comme cette photo !

Insoumis
jusqu’à son dernier éclat de rire
Hommage à Jean-François Kahn qui vient de mourir. D’autant qu’il a joué un vrai rôle dans ma vie de journaliste. Je l’ai rencontré pour la première fois au début des années 80. Déjà une star, moi jeune reporter, Je m’étais alors pris une sacrée engueulade car je lui avais avoué vouloir «monter à Paris». Après m’avoir traité de «crétin», il s’était lancé dans un réquisitoire enflammé contre le centralisme parisien qu’il fallait combattre en s’engageant en province, «un sacré chantier» vu le niveau des médias. J’ai cédé à son incantation, convaincu.
40 ans de journalisme, jamais Paris ou presque. Un tour de France : Nancy, Toulouse, Marseille… Et Lyon où il est venu soutenir, fin des années 2000, un magazine un peu turbulent, Lyon Mag’, que j’avais créé et qui se battait pour son indépendance. JFK s’est alors félicité de m’avoir engueulé ! En m’incitant à ne pas lâcher.
Un personnage. Curieux, engagé, courageux jusqu’à l’inconscience. Et toujours surprenant. Il pouvait planer dans les hauteurs, histoire et philosophie. Mais il pouvait aussi lâcher des blagues limite débiles ponctuées d’un rire un peu foutraque. Ou s’enthousiasmer pour des chansonnettes, une recette de gras-double…
Toujours passionné mais provocateur avant tout. On se souvient des fameuses couvertures de Marianne, sur Sarkozy «Le voyou de la République» ou sur Dassault «l’empereur tricolore de la corruption». Provocateur non pas pour le plaisir de faire du bruit mais pour mobiliser les esprits et provoquer une réflexion.
Un modèle pour toute une génération de journalistes, dont moi.
Bien sûr, il a parfois dérapé comme après le viol commis par son ami Strauss-Kahn au Sofitel de New York qualifié de «troussage domestique». Et il s’est parfois planté comme sur les Gilets Jaunes qu’il a trop rapidement assimilé à des fachos.
Malgré ses colères et ses excès, il était profondément attaché aux nuances et au pluralisme jusque dans ses propres contradictions que cet agitateur assumait. Incontrôlable évidemment. Un esprit libre, affranchi des convenances, allergique aux modes. Ennemi des extrémistes. Un mépris souverain pour l’argent et une méfiance teintée d’ironie vis à vis des pouvoirs. Deux fléaux pour les médias déjà pris en otage par cette «pensée unique» qu’il a théorisée. Un des derniers grands patrons de presse dans un univers aujourd’hui contrôlé par des grands groupes industriels et financiers.
Tout sauf conformiste. Issu de la gauche mais irréductible dissident dénonçant les staliniens ou les moralistes. Résistant à cette droite réactionnaire ou shootée au libéralisme sauvage.
Ennemi des idéologies. Mais tout sauf neutre. Républicain inflexible. Son concept de «centrisme révolutionnaire» était taillé sur mesure pour lui. Jamais résigné, toujours prêt à s’insurger. Insoumis jusqu’à son dernier éclat de rire.
Photo : la couverture du numéro de Marianne rendant hommage à son fondateur

"Plus grand que la légende"
Quelques minutes pour saluer la nomination
de François Bayrou à Matignon.
En soulignant son histoire d'amour avec un roi de France
A écouter urlr.me/P4HfGY Ou à lire :
-
« C’est un ami pour moi, un des seuls amis que j'ai eu dans ma vie et un des seuls qui m’ait donné un coup de main…»
C’est ce qu’a proclamé le nouveau premier ministre, devant l‘ancien premier ministre au cours de la passation de pouvoir dans la cour de l’Hôtel Matignon. Un vendredi 13, 13 décembre, notez bien cette date décisive.
Un vieil ami et même un très vieil ami puisque François Bayrou a dévoilé son nom : Henri IV qui s’il n’avait pas été assassiné par un SDF nommé Ravaillac, aurait eu ce jour-là très exactement 471 ans car né un 13 décembre.
Petit sourire aux lèvres, l’air très fier de sa proclamation, il s’est installé derrière son bureau, bureau régence évidemment. Et première décision, il a commandé un sondage express sur les fonds secrets de Matignon. Futur scandale ? En tout cas, un sondage pour savoir si les Français aiment son pote Henri IV. Réponse quelques heures plus tard : 99% des Français ignorent qui est ce gars là. Jeunes ou vieux, beaux ou moches, riches ou pauvres… Tous unanimes. Et quand on leur précisait que c’était un roi de France, tous unanimes encore pour chanter en choeur «marre des rois». Comme dirait les inconnus «à mort Henri Bâton-Vé !» l’ancêtre justement du fameux Louis Croix-Vé-Bâton, Inconnu également et qui lui aussi mal fini mais en perdant la tête.
De quoi agacer l’ami François qui a piqué sa première en colère avant de prendre une deuxième décision, celle de consacrer son discours de politique générale devant les députés à son ami de 471 ans.
En préparant son speech il a alors sélectionné les points cardinaux sur lesquels il voulait insister. Quatre évidemment. Quatre mots : blanc, messe, vert et poule.
De quoi rafraichir la mémoire de ces français nuls en histoire, a hurlé toujours en colère l’ancien prof devenu ministre de l’éducation.
"Paris vaut bien une messe"
Messe d’abord. C’est le fameux «Paris vaut bien une messe» qui ne veut pas dire que Paris ne vaut rien, comme le pense ce provincial militant, béarnais comme Henri. Une tribu du sud ouest réputée têtue.
Non ce «Paris vaut bien une messe» signifie tout simplement que ce roi de France dont le père était catholique mais qui a été élevé par une mère protestante, a décidé pour pouvoir accéder au trône de se convertir. Un retournement de veste salué alors comme pragmatique. Et même magique puisque ça eu pour effet de mettre fin aux guerres de religions, 40 ans de bagarres sanglantes et 2 millions de morts selon la police, au cours notamment de la grande manif de la Saint Barthelemy qui a dégénéré, un génocide selon la CGT.
En tout cas, Henri le néo-catho en a profité pour signer l’édit de Nantes qui autorisait les parpaillots à pratiquer leur religion. Mais trop en avance sur son temps, il a loupé le Prix Nobel de la Paix.
Une messe exemplaire en tout cas pour François Bayrou qui lui rêve de réconcilier la gauche et la droite. En organisant une grande messe au centre.
"Vert Galant"
Vert, c’est le deuxième point cardinal de François, qui sur ce coup est limite mauvaise foi. Car si effectivement le surnom décerné à son vieil ami était «Vert Galant».cela soulignait non pas qu’il était un militant écologiste bien élevé mais un sacré coureur de jupons, limite obsédé sexuel.
Une centaine de maitresses identifiées par Voicy l’ancêtre du magazine Voici. Tout ça confirmé par les historiens qui ont recensé pas moins de 22 enfants de lui. Sans compter les OVNI.
Donc raté cette tentative de François pour séduire les écolos. Quoique chez les chefs écolos d’aujourd’hui il y a de nombreux chauds lapins dont certains ont même fini sur le bucher médiatique.
«Une poule au pot tous les dimanches»
Troisième point cardinal. Poule, rien à voir avec le Vert Galant. C’est la fameuse promesse d’Henri IV de pouvoir manger «une poule au pot tous les dimanches» y compris aux plus pauvres des français. Pionnier là encore mais cette fois de la défense du pouvoir d’achat.
Du coup pour faire face à la demande, son ministre Sully va inciter les agriculteurs souvent en colère à la fermer et à pratiquer une agriculture intensive en répétant «pâturage et labourage sont les deux mamelles de la France». Mamelle ta mère lui aurait répliqué Marine Tondelier la Jeanne d’Arc Verte.
Ça n’a rien à voir mais on en profite pour préciser que Sully le malin a réussi à effacer la dette de la France qui déjà accumulait les déficits sans avoir besoin de la Sécu et des retraites. Contrairement à son successeur Bruno le Maire qui planquait les déficits, lui il y est allé franchement, en déclarant la France en faillite ! Pour ensuite faire un sacré chantage à ses créanciers : soit je vous rembourse la moitié de ce que je vous dois, soit vous ne reverrez jamais votre fric. Et ça a marché !
«Ralliez vous à mon panache blanc»
Autre couleur pour conclure ce quatuor cardinal : Blanc. Une allusion biroutienne au célèbre QCM aujourd’hui oublié : quelle est la couleur du cheval blanc d’Henri IV ? Vraie question en fait car Henri IV avait un cheval qui s’appelait Blanc. Et pourquoi il a choisi de baptiser ainsi son cheval ? Parce que ce roi coquin était obsédé par la propreté. Avec lui, il fallait toujours que tout soit toujours nickel. Ses caleçons comme ses draps ou ses panaches. D’ailleurs sa devise c’était justement « ralliez-vous à mon panache blanc» qu’il lançait à ses soldats sur les champs de bataille.
Blanc, Vert, Messe et Poule. Tout mon programme, pensait le nouveau premier ministre en relisant son discours. Très content de faire la leçon aux députés en étant convaincu d’être ovationné. Y compris par les Ravaillac de la tribu des Insoumis.
Et l’immigration ? C’est la question, s’est alors dit François, qu’allait lui poser une autre Jeanne d’Arc, nommé Marine aussi mais qui risque, elle, le bucher judiciaire. Il a mijoté sa réplique évidemment magistrale en rappelant qu’Henri le guerrier a repoussé de nombreuses invasions avec son panache blanc. D’ailleurs c’était même un obsédé des frontières mais qui n’a jamais hésité à les violer. Bref un vrai centriste !
Bon on arrête. Devant les députés, Henri Bayrou pardon François Bayrou est bien décidé à rendre un vibrant hommage à son roi adoré qui, selon lui, a inventé le centre. C’est à dire l’art de cultiver son propre centre, son nombril.
D’ailleurs il a avoué, ça ne s’invente pas, à Secret d’Histoire : «Henri IV est plus grand que sa légende» avant d’ajouter d’un air coquin «mais il n’y a pas de destin sans légende». Il parlait de lui évidemment.
Décembre 2024

Pourquoi
tant de haine ?
A peine nommé, il a été le ministre le plus critiqué par la gauche. Traitée tous les noms : escroc, looser, crétin… Et surtout traitre ! Manuel Valls, homme de gauche évidemment. Pourquoi tant de haine ? Quelques minutes pour répondre avec un peu de recul et d’humour. Podcast Philo Décrypte urlr.me/6gcZUw

Un jeune crétin
devenu un vieux menteur
«Donald who ?» Il est presque sympas ce Trump junior dans «The apprentice». Presque. Méprisé par son père milliardaire qui l’envoie collecter les loyers dans ses immeubles pourris de New-York. On l’insulte, on lui crache dessus… Et il encaisse. Une bonne tête d’enfant gâté, blond et rond, gavé aux MacDo. Pas même capable de tenir trois verres, ni une conversation sensée. Un peu crétin, amoureux têtu d’une bimbo ambitieuse et qui ressasse un rêve : construire un gigantesque hôtel au coeur de cette ville impitoyable. Absurde selon son paternel. Trump Tower !
Jusqu’au jour où il croise un avocat voyou qui va allumer une flamme au fond de ses yeux bleus. Et lui fixer un cap, «killer ou loser», en lui inculquant quelques règles : «toujours attaquer», piétiner les lois et les gens, ne «jamais avouer»… Le tout couronné par un «Always claim victory !» prometteur. L’élève finira par dépasser le maître avant de s’en débarrasser.
Toute la force de ce film, soutenu par un formidable duo d’acteurs, c’est de raconter tout simplement les préliminaires d’une incroyable aventure. Un réquisitoire implacable contre cette Amérique fric et réac, qui dans quelques jours risque de réélire ce jeune apprenti devenu un vieux clown menteur et brutal.
Vendredi 18 octobre 2024

Une nuit, une vie !
Un sacré défi. Thierry Frémaux n’a pas hésité à le relever en se faufilant dans la fameuse série «Ma nuit au musée» des éditions Stock où l’ont précédé de belles plumes comme Lydie Salvayre ou Kamel Daoud.
Il faut dire qu’il a choisi un territoire familier : son musée Lumière. Un «château» planté dans la périphérie lyonnaise, auquel il a consacré l’essentiel de sa vie. D’ailleurs c’est lui-même qu’il raconte, en se baladant dans ce temple du cinéma des origines. Du Sahara quand, adolescent, il appris à ne plus avoir peur jusqu’au tapis rouge du Festival de Cannes. Son quartier des Minguettes, vélo et judo, Radio Canut et Positif…. Avant d’être embarqué par Bernard Chardère le père de l’Institut.
«Cinéaste, j’en rêvais. Je n’osais pas» avoue Thierry Frémaux avant d’ajouter «Je me suis dévoué aux films des autres».
Au coeur de ces 250 pages, une date à retenir, une seule : le 19 mars 1895. Un mardi, où tout a commencé avec le tournage de Sortie d’usine. «Un premier cinématographe a été fabriqué mais les Lumière se disent : le présenter n’est pas suffisant, montrons à quoi il sert».
Premier film d’où le titre de ce livre. Les frères Lumière surplombent l’histoire du cinéma, explique-t-il, parce que leur cinématographe donne le ton d’un cinéma tourné vers le public. Rien à voir avec la machine à sous très individualiste de l’américain Edison. D’ailleurs, plus qu’un inventeur, Louis Lumière est «le premier des cinéastes».
L’arroseur arrosé, Voltige, Repas de bébé, L’arrivée d’un train à la Ciotat… 1 428 films qui ouvrent un chemin sans fin. Des «vues» qui imposent une règle éternelle : «faire l’imbécile devant une caméra» ! Avec à la clef une exigence : la simplicité.
Magnifique plaidoirie. D’autant qu’il appelle Malraux en renfort pour célébrer «l’invisible permanence de ce qui a triomphé de la mort, ce que nous appelons la culture». En convoquant au fil de pages les grandes figures du cinéma : Mélies, Chaplin, Scorcese, Godard, Felini…
Mais surprise, il achève sa nuit avec la femme de ménage turque qui débarque au petit jour alors qu’il s’est endormi. Elle s’excuse de l’avoir réveillé «en plein rêve». Il la rassure avant de conclure en quelques mots : «Je suis réveillé maintenant mais je rêve toujours».
Un style sobre, direct. Imagé bien sûr, le mot juste, et toujours un humour pour mettre à distance cette lumière qui aveugle le papillons.
De «l’atelier» au sommet jusque dans «les sous-sols» cadenassés, une belle balade dans ce Château Lumière. Une nuit, une vie !
Dimanche 1er septembre

Majorités absolues
Une sacrée claque. Une calque d’abord pour les commentateurs, dont moi. Une claque aussi pour les sondeurs qui ont fondé la plupart de ces commentaires. Ce qui pose un problème de fond car les sondages et les projections ne sont pas neutres dans un scrutin.
Tout le monde ou presque avait pronostiqué la victoire du Rassemblement National. Ou dans les derniers jours, une assemblée ingouvernable. Ce qui est le cas avec cette surprise d’un Nouveau Front Populaire en tête. Mais coalition fragile, loin de la majorité absolue. Autre surprise la résistance d’Ensemble, fragilisé lui aussi. Et surprise encore avec un Rassemblement National qui obtient moins de 150 sièges avec 36% des suffrages, mode de scrutin oblige. Affaibli mais qui réalise une progression spectaculaire.
A qui la faute ? Le président de la République n’est pas totalement innocent ! Même si le job n’est pas facile. Cet admirateur de Machiavel a pris une double claque en pensant que cette dissolution brutale, le remettrai au centre du jeu. Soit avec une victoire du RN et une cohabitation avec Jordan Bardella sous sa surveillance. Raté. Soit une assemblée divisée en trois blocs où il pourrait construire cette coalition droite-gauche dont il rêve. Pas gagné !
Cette claque devrait également sonner la planète politico-médiatique. Avec une exigence qui s’impose : réformer un système qui aujourd’hui imprègne les mentalités politiques car seule une majorité absolue permet de gouverner. Alors que la France est aujourd’hui «un archipel» comme dirait l’excellent Jérome Fourquet. Un archipel où chaque sensibilité vit sur son île en défendant son identité, ses intérêts et ses ambitions alors qu’aujourd’hui la seule solution est de travailler ensemble sur la base de compromis.
Pas facile dans une France où la majorité absolue qui s’impose c’est une majorité contre. 79% contre Macron, 75% contre Le Front Populaire, 64% contre le Rassemblement National… Trois blocs, environ trois tiers. Irréconciliables.
D’où, sauf miracle, une impasse en perspective. Mais on ne va pas avoir le culot de faire des pronostics !
Lundi 8 juillet 2024

Beau et intelligent
Magnifique ce "Comte de Monte-Cristo". Un film à la hauteur du fameux roman d’Alexandre Dumas. Long, trois heures, mais pas la moindre longueur.
L’histoire, tout le monde la connait : quelques instants avant de se marier, un jeune marin Edmond Dantès qui vient d’être nommé capitaine, est arrêté. Accusé par des jaloux, cet innocent est embastillé au château d’If. Des années d’enfer. Mais un abbé lui livre le secret d’un trésor et il s’échappe. Devenu riche et puissant, il va alors se venger… Inspiré d’un fait divers retentissant au coeur du 19ème siècle. Et publié en feuilleton, 1 300 pages dans sa version originale !
Un film construit d’ailleurs autour du chiffre trois. Trois traitres qui ont organisé le complot, un procureur un général et un armateur. Trois complices qui vont aider Dantès à leur faire payer cette forfaiture. Trois femmes : la fiancée qui l’a oublié, une fantôme sauvée d’un naufrage et sa mystérieuse filleule. Mais surtout une trilogie qui rythme cette épopée : bref bonheur, enfer interminable et vengeance sans fin. Chaque étape marquée par trois phrases dont celle qui fait basculer l’intrigue : «Ce n’est pas de la vengeance mais de la justice». Une voix off et des dialogues ciselés, merci Dumas. Jusqu’à cet aveu final du héros : «Je suis le bras aveugle de la fatalité».
Costumes et décors superbes, châteaux somptueux et geôles lugubres, paysages splendides. Et la mer immense, ses tempêtes et ses profondeurs, ses frégates et clippers majestueux… Des images saisissantes. Et des comédiens remarquables dont autour d’un Pierre Niney magistral, triple visage du jeune marin, du détenu perdu et du vengeur masqué. Un talent impressionnant.
Alors oui c’est un film classique. Rien à voir avec le cinéma français qui souvent radote avec ces films à message ou qui psychologisent au rabais. Non, pas de génie fumeux. Mais la mise en scène sobre, tout étant très efficace, spectaculaire même, d’un chef d’oeuvre littéraire pour le rendre populaire. Le succès serait largement mérité.
Un film beau et intelligent à voir en famille !
Vendredi 28 juin 2024

Un miracle qui dérange !
Rithny Panh est Cambodgien. Petit fils de paysan, fils d’instituteur. Il a 11 ans, lorsque les khmers rouges prennent le pouvoir. Toute sa famille est éliminée et lui se retrouve dans un camp de rééducation où il assiste aux pires atrocités. Mais il réussit à s’échapper. Thaïlande d’abord. Puis France. A l’époque c’est tout juste si on l’écoute, encore moins on le croit dans les cénacles parisiens qui ont mis des années à reconnaitre l’horreur : Un million et demi de morts. Le cinquième de la population.
Dans les années 80, devenu menuisier, Panh laisse tout tomber pour entrer à l’IDHEC, la fameuse école de cinéma. Et il va consacrer sa vie à témoigner en images. Documentaires, courts puis longs métrages. Plus d’une vingtaine de films. Et une dizaine livres. De retour au Cambodge, il continuera à se battre en créant un centre pour archiver toutes les documents qui accusent.
Aujourd’hui, il ne lâche toujours pas. Avec ce «Rendez-vous avec Pol Pot» qui raconte justement l’aventure d’un trio qui débarque à Phnom Penh en pleine «révolution». Une journaliste, un photographe et un intellectuel maoïste à qui
on a promis un rendez-vous avec «Frère numéro 1». Mais on va d’abord les balader au coeur d’un pays dévasté et martyrisé. Mises en scène et mensonges pour tenter de dissimuler le massacre en cours. «Si vous échouez, on ne pourra plus rêver !» proclame l’intellectuel enthousiaste qui a connu Pol Pot à la Sorbonne. Mais peu à peu ils vont commencer à ouvrir les yeux… Jusqu’à la rencontre avec le dictateur, superbement filmé.
Un film sombre, très sombre, rythmé par des images d’archives en noir et blanc et par un jeu de marionnettes qui symbolise ce voyage au coeur de l’enfer. Villes désertes, ombres et fantômes, rizières peuplés d’esclaves, visages fermés, peur et douleur. Et un silence de plomb percé par les cris des khmers rouges qui mitraillent leur propagande.
Un film qui gêne certains intellectuels aujourd’hui repentis. Car le réalisateur cambodgien, prix du scénario au dernier Festival de Cannes, leur rappelle que dans les années 70 ils ont célébré ce «miracle».
Samedi 15 juin 2024
Dessin
de Bod

Un sacré pari !
Dans moins d’un mois, la France aura un nouveau premier ministre : Jordan Bardella. C’est l’objectif du Président de la République dont la dissolution, dimanche soir, de l’Assemblée Nationale n’a pas été improvisée. D’autant plus que le résultat de cette élection européenne est tout sauf une surprise avec une extrême droite à 40% qui confirme son score de la dernière présidentielle
Pourquoi cette décision suicidaire ? Pour une raison simple : sans majorité à l’assemblée et contesté dans l’opinion, Emmanuel Macron savait qu’il allait vivre un enfer pendant les trois dernières années de sa présidence. Avec en prime, sans doute, une crise genre gilets jaunes. Un boulevard pour l’extrême droite assurée alors de remporter facilement en 2027 la présidentielle et, dans la foulée, une majorité à l’Assemblée Nationale. Pour entrer triomphalement à l’Elysée et à Matignon, en ayant tous les pouvoirs.
Voilà pourquoi il a décidé d’anticiper ce désastre. En permettant au parti de Marine Le Pen de gouverner la France. Mais sous surveillance. Car le président de la république disposera d’un certain nombre de pouvoirs : diplomatie, justice et défense. Mais aussi nominations, signature des textes de loi, référendum, saisine du conseil constitutionnel… De quoi éviter les dérapages de cette cohabitation avec un gamin de 28 ans. Et surtout de quoi mettre l’extrême droite au pied du mur, en démontrant son incompétence et son impuissance. Ce qui lui fera perde les deux élections de 2027.
Edouard Balladur et Lionel Jospin l'ont compris un peu tard !
Bref, Emmanuel Macron donne la parole au parole au peuple pour lui donner une leçon. Sacré pari politique. Mais vu le personnage, pas très étonnant qu’il le tente.
S’il réussit il entrera dans l’histoire. S’il échoue, aussi.
Dimanche 9 juin 2024

Uniforme
Une gaffe de la nouvelle ministre aura suffi pour rallumer la guerre scolaire. Privé contre public. Pas sûr que ce soit le vrai problème de l’Education Nationale.
Un certitude c’est la plus grande entreprise française. Et de loin. A coté, les Total, LVMH et autre Danone ne pèsent pas lourd. Rien que le nombre de salariés : plus d’un million ! Même chose pour ses jeunes «clients», 12 millions qui défilent chaque jour dans ses 60 000 «boutiques». Le fameux mammouth.
Sans compter la filiale universitaire. 3 millions de clients et près de 200 000 salariés.
Tout ça coûte cher, de plus en plus cher. 64 millards d’euros l’année dernière. Alors qu’en 1968, on plafonnait à 20 millards de… francs. Vingt fois plus en un demi siècle. Impressionnant là encore. Mais une seule question s’impose : pour quel résultat ?
Un indicateur, cette gigantesque entreprise produit chaque année 600 000 bacheliers. Trois à quatre fois plus qu’en 68. Pas terrible si on compare l’évolution des moyens. D’autant que les experts sont unanimes, ce diplôme a beaucoup perdu de sa valeur. Alors que la moitié des élèves ne savent pas bien lire lorsqu’ils entrent en 4ème, sans parler des mathématiques. Et on ne parle pas des classements internationaux…
La solution ? Compliqué sans aucun doute. Mais déjà, une évidence s’impose : Vous connaissez une entreprise qui a un million de salariés et 12 millions de clients sans que ses 60 000 boutiques aient la moindre autonomie ? Mêmes programmes, mêmes méthodes, mêmes règles…. Tout ça pour faire face à une grande diversité.
L’urgence n’est pas d’imposer un uniforme, mais au contraire d’encourager un peu de liberté. Pour laisser respirer cette entreprise et qu’elle invente son avenir.

Artificielle
«Le problème c’est le mot intelligence qui n’a pas le même sens en anglais et en français»
Conférence mardi soir à Lyon d’Etienne Klein, physicien et philosophe des sciences. Au programme : l’intelligence artificielle qui fait peur à tout le monde. Pas à lui. Avec humour, il explique qu’en anglais intelligence signifie «collecte et traitement de données» alors qu’en français c’est l’art du raisonnement, analyse, critique… Toute la différence entre comprendre et savoir.
Rien à voir, souligne ce prof à l’Ecole Normale qui raconte comment il a découvert que ses élèves utilisait le ChatGPT pour réaliser leurs devoirs. «Un jour en corrigeant les copies, je me suis aperçu qu’ils faisaient beaucoup moins de fautes d’orthographe mais que leur pensée était identique et plate. J’ai mis 13 à tout monde !»
Pour lui, «l’IA n’est pas intelligente c’est un abus de langage»
Suit une longue démonstration où il appelle Einstein et Galilée à la rescousse pour démontrer que «les théories en disent plus que les données». En clair, c’est le raisonnement, «l’argumentation» qui prime. Et il regrette, que «les cours de physique ont été remplacés par des cours de codage informatique» avant d’ajouter : «que devient la vie de l’esprit dans un monde de clics ? Est-ce qu’on va mieux penser avec l’IA ou penser comme l’IA qui ne pense pas».
C’est un scientifique qui parle. Pas un poète.

Tous complices !
Un monstre. C’est peut-être le mot qui résume le mieux Gérard Depardieu. France 2 l’a confirmé jeudi soir avec «Complément d’enquête». Un Obelix sans filtre. Tout est énorme chez lui. Sa corpulence, son nez, son rire, sa boulimie, ses blagues… Capable de lâcher les pires énormités. Du genre, «les femmes adorent faire du cheval car elles ont le clito qui frotte sur la selle». Le reste est du même calibre. Pas des images volées au contraire, il proclame tranquillement ces horreurs face caméra. Tout ça au cours d’un séjour en Corée du Nord où il distribue généreusement des mains au cul !
«Des paroles pas des actes» souligne un des rares acteurs à le défendre, en précisant : «même moi il me met des mains au cul».
Alors violeur vraiment, Depardieu ?
Exemple, Charlotte, apprentie comédienne à l’époque. Principale accusatrice, elle assure avoir été violée par Depardieu. Mais elle est revenue le lendemain. Et elle porte plainte après que la star lui ait refusé un rôle. En plus des caméras de surveillance témoignent qu’elle ne semblait ni contrainte, ni forcée. Plainte classée sans suite. Mais elle a re-porté plainte et s’insurge. Etrange témoignage, en tout cas.
En 90 minutes, le procès est tellement impitoyable qu’on a envie de rappeler un détail : Gérard Depardieu est présumé innocent, tant qu’il n’est pas jugé et condamné. Envie aussi de souligner une autre évidence passée sous silence dans cette enquête : tout est énorme chez Depardieu y compris et surtout son talent. Des Valseuses à Cyrano. 200 films, 200 millions d’entrées ! Enorme là encore. Et quand on est hors norme, difficile de rester normal !
Cela ne lui donne pas tous les droits, mais on se demande pourquoi cette chorale habillée de morale veut à tout prix décapiter ce petit voyou devenu une star, ce prolo de Châteauroux qui s’est imposé au pays des bobos… D’autant que ça fait un demi-siècle que le monstre se balade en liberté. Et tout le monde a supporté ça en silence. Hommes mais aussi femmes. Acteurs, actrices, réalisateurs, réalisatrices, producteurs, productrices, journalistes… Pour décocher un rôle, un interview ou un financement. Tous complices ! Sans doute les mêmes qui hurlent aujourd’hui.

Pas facile de mourir
Difficile de conclure. Gérard Collomb en est mort dans la nuit de samedi à dimanche. Victime d’un cancer de l’estomac, certes, mais aussi d’un final totalement raté.
On ne va pas rappeler ici son parcours. mais simplement le résumer en soulignant qu’il a réussi alors que ce n’était jamais évident. Quatre étapes surprenantes :
Fils d’un ouvrier et d’une femme de ménage, il a réussi à devenir prof après avoir décroché une agrégation de lettres.
Militant socialiste, tendance Rocard, il va s’obstiner et grimper tous les échelons, jusqu’à devenir député, malgré Mitterrand qui le méprise et le bloque.
Candidat à la mairie de Lyon, il va réussir à se faire élire dans cette ville de centre droit. Trois mandats, une vingtaine d’années.
Ascension couronnée, dernière étape, par sa nomination au ministère de l’intérieur après avoir été un des premiers barons de province à parier sur Emmanuel Macron.
Tout sauf brillant, mais des qualités indéniables. Une volonté, du bon sens, bosseur, un esprit ouvert et modéré…
Mais un an ministre, ça lui suffira pour péter les plombs. Banal quand on franchit un certain seuil. Alors qu’il aurait pu conclure sa carrière en beauté sous les dorures de la République, il va démissionner de son ministère pour tenter un quatrième mandat aux dernières municipales.
Gérard Collomb va se planter magistralement. Et tout Lyon qui aujourd’hui lui rend hommage, va le traiter plus bas que terre.
Ne pas savoir s’arrêter et s’effacer, c’est le redoutable virus qui frappe tous ceux qui exercent un pouvoir, quel qu’il soit. Pas facile car c’est au fond accepter qu’on est mortel. Et facile de refuser cette évidence. Ce qui n’empêche pas de mourir.

Un serpent
Inquiétante, très inquiétante cette vidéo de Tarik Ramadan sur Youtube depuis quelques jours. Mais il faut reconnaître que ce prêcheur islamiste est habile, très habile. Se présentant comme «islamologue», barbe soigneusement taillée, élégant, voix douce, souriant…. Il parle en choisissant ses mots sur un ton mesuré. Avec en toile de fond, une bibliothèque qui en impose.
Mais pendant 1h30 il va enfiler les mensonges. Exemple quand il suggère que les terroristes qui ont commis le massacre du 7 octobre n’avaient pas reçu cet ordre de la direction Hamas ! Enorme quand on sait qu’on a retrouvé sur des documents sur ces sauvages avec un ordre clair : tuer le maximum de civils israéliens.
Tout aussi incroyable quand il affirme que pendant la dernière guerre, les résistants français se sont eux aussi attaqués à des civils ! En faisant croire que Mandela justifiait la violence face aux injustices. Avec en prime un vibrant hommage à un grand humaniste, Kadhafi !
Pas un mot bien sûr sur les otages sauf pour affirmer que les palestiniens jugés et détenus en Israël sont des «otages». En affirmant qu’Israël était «au courant» et a «laissé faire» pour se poser en «victime».
Bref on en déduit logiquement que les israéliens sont des terroristes. Alors que les palestiniens sont des résistants.
Dans la foulée, il dénonce le lobby juif qui «tient à la gorge» les Etats Unis et l’Europe. Pour conclure à «une grande manipulation médiatique» qui passe sous silence ces «vérités».
Puis tout à coup, regard de velours, Ramadan prend un air grave pour déplorer «les victimes civils» du Hamas, notamment les enfants. Mais il n’osera quand même pas déplorer les viols de femmes, lui qui a été mis en examen pour une série de viols et passé près d’un an en prison, avant son jugement prochain. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir le culot de continuer à minauder des sermons islamistes. Du genre : la France n’est pas un pays de culture judéo chrétienne mais «majoritairement» de culture judéo chrétienne en sous-entendant que cette majorité est en train de basculer ! D’un air menaçant mais toujours en douceur.
Un vrai artiste qui manie avec talent cette fameuse «takia», l’art de la dissimulation encouragé par certains imams. Tout en prudence et nuances mais un véritable réquisitoire contre les juifs et les occidentaux, emballé dans une soi-disante «analyse». Tout ça pour conclure par un appel à «la mobilisation» des musulmans. On imagine l’impact sur les jeunes banlieues. Beaucoup plus dangereux que les imbéciles qui profèrent des inepties sur les réseaux sociaux.
Un serpent !

Le paradoxe du Loto
Vu le dernier Cash Investigation sur France 2 ciblant «les ultra riches».
Le plus frappant ? Ce ton très agressif de la présentatrice aggravée par la faiblesse de sa démonstration malgré une avalanche de chiffres pour dénoncer l’existence même des «122 milliardaires français».
Pas question de défendre ici certains abus. Notamment les rémunérations ridicules de certains patrons du CAC 40, pas souvent des entrepreneurs et rarement sanctionnés quand ils se plantent.
Mais comment ne pas souligner quelques évidences passées sous silence par Cash. Ces grandes fortunes couronnent avant tout des réussites professionnelles. Fortunes d’ailleurs virtuelles à la merci d’un cours de bourse. En plus, ces fameux riches paient des millards d’impôts, 5 par an uniquement pour LVMH de Bernard Arnaud. 10% de l’impôt sur le revenu ! Et ils créent de la valeur, des emplois, sans parler des innovations, des exportations, des fondations humanitaires ou artistiques… A noter au passage, un grand silence sur certains ultras : les stars du ballon ou de la chansonnette.
Deux exemples assez révélateurs dans ce réquisitoire :
«Le pacte Dutreil», d’abord, qui permet de transmettre son entreprise à ses enfants grâce des allègements fiscaux, dénoncés par cette «enquête» sans même souligner que cela évite à ces entreprises d’être rachetées par des groupes étrangers, faute pouvoir payer les droits de succession. Ça coûte cher, insiste la journaliste. 500 millions. Et l’abattement fiscal-social des journalistes ? 200 millions. Injustice aussi ?
Le plus drôle ce sont ces 35 minutes consacrées aux fameux yachts, un luxe révoltant, images à l’appui. En plus, s’étrangle une voix off, ils peuvent faire le plein hors taxe à l’étranger !
Bref difficile de ne pas avoir la haine contre les ultras après avoir avalé ce Cash. Certes, il y a des riches voyous, comme il y a des journalistes voyous. Mais pourquoi généraliser en entonnant ce petit refrain populiste «mort aux riches» comme certains défilent en hurlant «mort aux flics» ou «mort aux juifs».
De quoi décourager les entrepreneurs, ce réflexe anti-riches ? Pas vraiment, ils sont aujourd’hui plus de 3 millions en France. Avec de nombreuses start-up dont les créateurs risquent de rejoindre le club des 122 mais qui adorent prendre des risques… D’autant qu’ils ne regardent plus la télé !
Et les autres ? «Tout le monde est choqué» répète la présentatrice en suggérant «un risque de soulèvement» contre ces «privilégiés». Et pourtant, paradoxe, des millards sont joués au Loto. 60 depuis sa création par des millions de français qui rêvent de devenir un de ces ultra riches qu’ils détestent !

Moment rare
Débat ce lundi après-midi à l’Assemblée Nationale sur la situation au Proche Orient. Avec une intervention remarquable. Jean-Louis Boulanges, député Modem et président de la commission des affaires étrangères.
De la hauteur, tout en fermeté et nuances.
Il s’est tout d’abord déclaré «horrifié» par «la violence barbare» du 7 octobre en ajoutant inflexible : «aucune cause politique, même celle du peuple palestinien, ne peut justifier le recours au terrorisme». Et il a insisté : «Israël a droit à la légitime défense. Et en même temps, nous sommes tous sensible à la détresse de Gaza»
Puis il a dénoncé avec mesure la stratégie du premier ministre israélien Netanyahou notamment sa tactique de «soutien» au Hamas qui a «contribué» à ce drame. D’autant plus qu’une «population sans avenir et sans espoir» ne peut pas être attirée par la «modération». Alors que «la solution à deux Etats» est la seule pour «une paix durable».
Mais il aussitôt rappelé que la France est "totalement solidaire" d’Israël et de son "droit à la sécurité».
Au lieu de jeter de l’huile sur le feu, ce vieux militant centriste a préféré jouer la carte du consensus. En concluant visiblement ému : «L’essentiel de cette assemblée est d’accord sur l’essentiel. Beaucoup plus que nous ne le croyons ».
Très applaudi de droite à gauche, parfois debout, y compris par certains Insoumis. Un moment rare, vu l’empoignade permanente à l’assemblée. Mais évidemment pas de faire quoi le buzz alors que ça le mériterait largement.

«J’ai attrapé la guerre dans ma tête»
Lu «Guerre» de Ferdinand Céline, dont le manuscrit vient d’être découvert 88 ans après avoir été écrit. Feuillets griffonnés, écriture de médecin, parfois difficile à décrypter, que Gallimard vient d’éditer. Premier jet, non relu, ni corrigé par l’auteur du «Voyage au bout de la nuit».
130 pages stupéfiantes où il raconte sa guerre de 14. Blessé au bras et à la tête au cours d’une escarmouche sur le front. «Toute l’oreille gauche était collé par terre, avec du sang, la bouche aussi. Entre les deux y avait un bruit immense. J’ai dormi dans ce bruit et puis il a plu de pluie bien serrée…»
Hospitalisé, décoré… Mais toujours «l’horreur du boucan qui défonçait la tête».
Un style évidemment. Brut, c’est ce qui est interessant car on se glisse dans «l’atelier» de cet écrivain qui s’affranchit des règles. En tabassant les convenances grammaticales : pas de négation, ni d’inversion interrogative, auxiliaires piétinés… On connait la musique célinienne. Mots magiques, mélange de parlé et d’argot. Un rythme aussi.
Une écriture très contemporaine qui a influencé des générations de «scribouillards».
Céline raconte cette «grande» guerre vue d’en bas. Celle du brigadier chef Ferdinand. Vécue. Beaucoup de sexe, de sang, d’alcool…. Toujours à la frontière du rire et des larmes qui se marient dans un cynisme grinçant. Quelques personnages suffisent pour planter le décor de cette convalescence sous les bombardements : son voisin de lit, Cascade le souteneur et sa belle Angèle qui tapine à l’ombre de l’hôpital, son infirmière maléfique Mlle Lespinasse, le pitoyable Dr Meconille, ses parents minables qui se précipitent à son chevet en pleurnichant… Tous de pauvres «cons» que l’auteur accable de son ironie cinglante.
On entre difficilement dans ce vrai faux roman. Le temps de s’acclimater aux provocations stylistiques. Mais c’est une expérience qui permet de sentir le démon qui rode autour de ce génie pris en otage par son talent. Vertige qui lui impose d’aller toujours plus loin jusqu’au délire. En s’affranchissant du sens.
Une phrase, perchée dès les premières pages, le souligne : «J’ai attrapé la guerre dans ma tête». Tout est dit. En annonçant les horreurs dont Céline va tartiner son oeuvre.

Majorité
Une écrasante majorité des Français est contre. Contre un report de l’âge de la retraite. Logique. Qui peut bien vouloir travailler plus longtemps ? Personne à part quelques illuminés. Tous les sondages le confirment.
D’ailleurs la liste est longue des questions qui provoquent des réponses logiques.
Qui veut payer plus d’impôts ? Qui veut plus d’immigré clandestins ? Qui veut plus d’inflation ? Qui veut plus de délinquants ?
Qui veut moins de médecins, moins de policiers, moins de profs ? Moins d’arbres, moins de vacances ? Personne.
Qui est contre la faim dans le monde ? Contre la maladie ? Contre la guerre ? Contre la mort ? Tout le monde.
Bon on arrête. La seule question que pose ce genre de question est simple : logique d’être pour ou contre un certain nombre d’évidences mais à quel prix ?
Contre la guerre, y compris en collaborant avec le pire des dictateurs ?
Contre les impôts, y compris en exigeant de plus en plus de services publics ?
Contre l’immigration y compris en refusant de faire les boulots qu’ils assurent ?
Contre travailler deux ans de plus y compris si l’espérance de vie a doublé en un siècle. Alors que le nombre d’actifs pour financer un retraité a été divisé par deux en 50 ans.
Quand les sondages posent des questions simplistes, ils obtiennent logiquement des réponses du même calibre.
Reste à savoir si cette logique simpliste doit servir de base pour construire un avenir qui s’annonce complexe.

Autre siècle
Lu un petit livre, «La côte sauvage», qui vient d’être réédité. Seul et unique roman d’un jeune prodige : Jean-René Huguenin. Né en 1936 et mort à 26 ans dans un accident de voiture deux ans après avoir remporté un immense succès.
On pense évidemment à Radiguet et son «Diable au corps».
«Un véritable écrivain» proclamait Mauriac. Effectivement. Roman aussi bref que sa vie. 172 pages pour une histoire simple de vacances en Bretagne mettant scène un triangle amoureux, Anne et Olivier frère et soeur fusionnels qui se disputent l’ami Pierre.
Une écriture soignée. Longues phrases, bien construites, rythmées par des dialogues vifs et des retours à la ligne sans majuscule. Mais aussi de belles formules comme ce «Elle ne te regarde pas, elle te rêve» ou encore « Sois tranquille, tu ne brilleras jamais, pour moi, que du coté où je t’éclaire».
Avec rien, un suspens subtil. Ombre et lumière. Tout est suggéré, en finesse. Autre siècle !

OPA
«Russie, combien de chiffre d’affaires ?» aurait sans doute lancé Kissinger, le champion de la «réalpolitique», si le président des Etats Unis lui avait confié le «dossier» ukrainien.
Rares sont en effet les commentateurs de cette crise qui abordent le problème sous l’angle économique. En préférant disserter sur l’histoire, la géographie… voire la psychiatrique.
Un angle pourtant pertinent car il repose sur des chiffres incontestables. Avec une donnée de base : la Russie est une petite «entreprise». Sa production annuelle de richesses (PIB), environ 1 500 millards d’euros, est équivalent à celle de l’Espagne pour une population trois fois plus importante et un territoire 33 fois plus étendu.
Certes cette PME a des «stocks» importants de gaz, pétrole et minerais. Ce qui lui permet de dégager un «résultat» commercial flatteur quand les cours sont au plus haut. Mais elle est lestée par des «frais fixes» très importants, «investissements» militaires surtout, quatre fois plus que l’Espagne.
D’où l’extrême fragilité de cette «boite» dont le «chiffre d’affaires» par tête lui permet de figurer péniblement à la 65ème place du palmarès mondial derrière le Costa Rica ou la Croatie !
Bref son «pdg» a compris qu’il doit se dégager de cette impasse financière. D’autant que cet ambitieux «manager» rêve de figurer dans le peloton de tête du «CAC 40» comme son collègue chinois. Impossible sans un «bilan» solide pour financer ses «frais fixes» qui explosent.
D’où la stratégie de «croissance externe», très offensive qu’il a adopté. Avec le «rachat» de start-up indépendantes pour quelques kopeck au cours des dernières années : Crimée, Tchétchénie, Kazakhstan… Sans compter de vieux établissements en difficulté : Syrie, Libye, Centre Afrique…
Son modèle : un «groupe» qui pesait lourd au moment de son dépôt de bilan il y a 30 ans : l’Union soviétique et ses 15 «filiales» bien encadrées.
Ses concurrents enragent et le menacent de boycott commercial. Mais, pour le pdg Poutine, cela confirme son sens des affaires. Il a même décidé d’accélérer cette «dynamique vertueuse» en lançant une nouvelle «OPA» : Ukraine, 150 milliards de chiffre d’affaires. L’occasion d’augmenter le sien de 10%. avec une agriculture prospère et un réservoir de matières premières. Sans ce que ça lui coûte trop cher, quelques missiles.
S’il rate son « OPA», cet entrepreneur inflexible risque de se faire éjecter par son conseil d’administration, composé d’impitoyables oligarques. Mais en cas de réussite, il aura dans son viseur d’autres cibles prometteuses.
Reste un problème : la gestion de cette PME en plein développement. Car ce patron formé au management à l’ancienne qui a dépassé l’âge de la retraite, semble négliger les «ressources humaines». Ce qui le rend vulnérable dans un monde de plus en plus concurrentiel où certains utopistes veulent imposer un étrange système baptisé démocratie.
De quoi réfléchir aussi, au coeur de cette guerre économique, sur les stratégies de croissance !
Lundi 16 mai 2022