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Politique, culture, économie...

Philppe Brunet-Lecomte, journaliste, commente l'actualité.

Textes mis en ligne sur Facebook ou Linkedin.

Et des podcasts, quelques minutes

avec parfois un peu de recul voir de l'humour

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"On ferme les yeux ?"

Eglise Saint Polycarpe, en bas de pentes de la Croix Rousse.

La porte est fermée, une dame s’approche, clefs en main. Une paroissienne. La nuit vient de tomber. Soupir un peu agacé, elle ouvre la grande porte en bois sombre. Quelques bénévoles attendent les jeunes migrants qui vont bientôt débarquer.

Depuis plusieurs jours, ils occupent cette église, au coeur de Lyon. Occupation pacifique. Une centaine, tous originaires de cette Afrique subsaharienne en crise. Ils viennent dormir ici avant d’évacuer le matin. Des «mineurs isolés» selon la formule consacrée. Mais ce statut qui permet d’être logés, nourris et accompagnés, leur a été refusé. Du coup ils sont à la rue.

Stoïque dans le froid, la paroissienne monte la garde sur le parvis. Elle avoue que cette occupation perturbe la vie de sa paroisse. En suggérant que l’immigration est «quand même» un problème. Mais son archevêque a dit qu’il fallait les accueillir. Alors elle, s’incline avec un petit sourire entendu. Dans l’entrée, une simple feuille de papier trône sur un pupitre où quelques mots ont été griffonnés : «Soyez tous les bienvenus dans la maison de Dieu» Tous, c’est le message, chrétien.

Mais cette vénérable église du XVIIème qui réunit chaque dimanche une centaine de fidèles, est aujourd’hui transformée en dortoir : matelas, couvertures, vêtements… En revanche, tout est propre et en ordre sous le regard vigilant du «collectif» qui s’est mobilisé.

Peu à peu, les «gamins» arrivent, saluant les bénévoles d’un petit «bonjour». Parmi eux, un grand gaillard, l’air frigorifié. Survêtement bleu, basket et parka marine, un masque sur le visage. Il hésite avant d’accepter de parler. Et peu à peu, il se lâche. Hallassane «avec deux s» précise-t-il dans un français coloré. Originaire de Côte d’Ivoire, Abidjan. Il raconte son aventure, deux ans de galère.

Pourquoi avoir quitté son pays ? «La misère». Membre d’une famille nombreuse et très pauvre. Un père chômeur, huit frères et sœurs. Dès l’âge de sept ans, il quitte l’école pour travailler. «porteur» armé d’une brouette, il intervient quand on le siffle, notamment sur les marchés. De quoi rapporter un peu d’argent à la maison.

Il envisage alors de rejoindre la France. Ses parents s’y opposent fermement. Mais il économise quelques centaines d'euros pour rejoindre la Méditerranée. Un véritable chemin de croix. Des mois et des mois à marcher ou trimbalé dans les camions pleins à craquer. Des fantômes qui rêvent d’une autre vie. Lui va traverser d’abord la Côte d’Ivoire, puis le Mali en guerre et se retrouver dans le désert algérien. La fin, la soif, la peur… «Un enfer» mais il tient le choc, convaincu qu’au bout du chemin, il va réaliser son rêve. On lui a dit que la France était «accueillante» alors il espère.

«Dur, très dur»

Mais il hésite pour la dernière étape, Algérie ou Libye ? Pour les Subsahariens, l’Algérie a une sale réputation car elle maltraite les immigrés. Il opte alors pour le chaos libyen en se disant que ce sera plus facile de se frayer un chemin jusqu’à la Méditerranée. Mais il est arrêté et jeté en prison. Par qui ? Il ne sait pas. Des mafieux qui vont le racketter. Des semaines enfermé, insulté, réduit en esclavage. Mais il réussit à s’échapper et à gagner une plage où un passeur va l’arnaquer pour lui faire traverser la mer. Un «petit bateau» fragile où il se retrouve avec une cinquantaine de migrants entassés les uns sur les autres. Une journée de tempête et enfin la terre. Lempedusa. Un sacré cirque. Mais des Italiens «pas très sympa». Du coup il il s’échappe à nouveau. Direction la France et par hasard Lyon où il se retrouve dans un squat en plein air. Jardin des Chartreux. Avec des mineurs que l’administration refuse de reconnaître comme mineurs. Livré à lui-même, il traîne, déprime, petits boulots au noir… La vie ordinaire d’un sans-papiers. À la merci des prédateurs qui rôdent et qui ciblent en priorité les filles pour les mettre sur le trottoir. Ce sont elles qui seront remises à l’abri en priorité, dans des maisons.

Halassane lui vit sous la tente. Il s’est fait un copain qui devient son «cousin». Une amitié de proscrits. Il n’est pas Ivoirien mais Sénégalais «pas grave» Ensemble, ils vont engager un recours pour qu’on reconnaisse leur minorité. Et ensemble ils attendent.

Après l’été et ses canicules, l’hiver brutal. «Dur, très dur» dit-il car en Cote d’Yvoire les températures descendent rarement en dessous le 20° la nuit. Pas facile de tenir dans cette France sibérienne, seul et sans horizon.

Voilà pourquoi il a suivi ses copains pour se réfugier dans cette église Saint Polycarpe. Glaciale, mais à l’abri des vents. Un peu inquiet de voir débarquer la police. Mais le Collectif Soutiens/Migrants Croix-Rousse s’est organisé sur WhatsApp avec le concours de gens du quartier qui ont apporté des matelas, des couettes, des manteaux…. Une sacrée solidarité. Responsabilité aussi, ils assurent une permanence la nuit, présents et vigilants. Pas de bagarre, pas de trafic. Mais ces enfants manquent de tout et surtout de perspectives.

Halassane avoue : «Souvent il se passe rien dans ma tête, rien, le vide». Depuis plusieurs mois, aucun contact avec sa famille. Son téléphone lui a été volé. Ils savent que c’est la galère, mais ils ne peuvent rien faire, à part lui répéter : «on t’avait bien dit».

Dans son regard une profonde tristesse. Soupirs et silences cachés derrière un grand sourire. Mais on sent chez lui une sacrée énergie. D’ailleurs comment ne pas craquer si on n’est pas une âme forte.

«Il faut du courage, mais le plus grand courage, c’est de tendre la main» murmure ce gamin en redressant la tête. Sincère et fragile. Une petite lumière au fond de son regard noir, «espoir» c’est le mot qu’il préfère.

 

Leur exploit ? «Etre encore en vie !»

Pour conclure, Halassane accepte une photo et d’enlever son masque. Devant un tableau catho. Ça ne le gêne pas ? Musulman «mais cool» précise-t-il en ajoutant qu’il se sent «bien» dans cette église.

Un regret ? Il hésite, une lueur triste dans le regard. On sent bien qu’il regrette d’être là, loin de sa famille, de ses copains, de son pays et du soleil. Alors il esquive en murmurant qu’il regrette ici «le froid». Et il répète plusieurs fois ce mot glacé. Un masque sur le visage pour se protéger. Pas simplement de cette température polaire mais aussi des regards méfiants, voire agressifs, ponctués parfois d’un «rentre chez toi». Sans illusion, il sait bien qu’ici, il est indésirable.

Un enfant déjà adulte. Une maturité sculptée par les épreuves.

Toujours imperturbable sur son parvis, la portière murmure : «je préfère qu’ils soient là, à l’abri plutôt que dans la rue, tenté de faire des bêtises…»

«Ils ne sont pas un danger. Ils sont en danger» plaide une jeune femme qui a débarqué ici avec des vêtements chauds. Alors qu’un vieux militant grogne contre les écolos de la Métropole qui «se bougent pas» avant de critiquer aussi Forum Réfugiés qui s’est débarrassé de façon «désinvolte» du problème. Un autre ajoute : «contrairement à ce qu’on croit souvent, ce ne sont pas des voyous ou des minables qui débarquent chez nous mais au contraire des héros anonymes» Leur exploit ? «Etre encore en vie !» Et ce jeune bénévole s’insurge «Facile d’être contre l’immigration, mais qu’est-ce qu’on fait quand ils sont là ? On ferme les yeux ?»

Impressionnante, cette église Saint Polycarpe une petite île douloureuse, perdue au milieu d’un océan d’indifférence. Saint Polycarpe, justement, une figure de la chrétienté naissante, évêque de Smyrne, aujourd’hui Izmir, Turquie. Intransigeant sur la vérité jusqu’au martyr, mais aussi un apôtre de la «patience» et de «l’espérance».

                                                                                                           Dimanche 30 décembre 2025

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Questions
sans réponses 

Eclat de rire général, mardi après-midi au Tribunal correctionnel de Lyon où on jugeait Jean-Michel Aulas, ou plus exactement sa plainte en diffamation contre le site d’information Rue89Lyon. Il faut dire que son avocat vient de lâcher une énormité : quand un journaliste pose une question et qu’on refuse de lui répondre, alors il doit se taire.

Même les juges ont l’air surpris.

Révélateur au fond d’un drôle de procès. A l’origine, un article pourtant prudent, armé de conditionnels. Mais un titre qui annonce la couleur : «Les Aulas s’envolent en jet privé vers des paradis fiscaux»

L’ancien patron de l’Olympique lyonnais aujourd’hui candidat à la mairie de Lyon et son fils qui a repris ses affaires n’ont pas supporté d’être suspectés d’évasion fiscale en ayant investi dans un aéroport américain destiné aux jets privés à travers un holding et un étrange «montage» financier qui passe par le Luxembourg et le Delaware, deux spots considérés justement comme des paradis.

Plus de deux heures dans une salle d’audience pleine à craquer de journalistes.

Sur le banc des accusés, l’auteur de cet article et son rédacteur en chef, jeunes, l’air intimidé. Une première pour eux de se retrouver devant un tribunal. Harcelé par les deux avocats d’Aulas, ils se défendent en douceur. Ni agressif, ni provoc. Mettant en avant témoignages et documents. En regrettant que celui qui les accuse a refusé de répondre à leurs questions malgré trois mails insistants.

Puis double plaidoirie des avocats d’Aulas, très agressifs vis à vis des médias, dénoncent «insinuations», « fantasmes»…

«On pose simplement des questions» réplique l’avocat des accusés en regrettant «un grand absent». Aulas évidemment.

Décision du Tribunal le 20 janvier. Mais au terme de cette audience, le débat se poursuit dans le grand hall du Palais de justice.

Une figure des écologistes lyonnais, devenu avocat, s’interroge. Lui qui s’est battu contre le Grand Stade de l’OL, l’acquisition des terrains, les millions d’argent public… se demande aujourd’hui pourquoi son vieil adversaire s’est engagé dans cette «aventure politique» où il va prendre de sacrés coups. Un bouquin circule «Aulas, l’enquête interdite» publié il y a quinze ans mais aussi des anecdotes et des rumeurs sur celui que certains ont baptisé «le menteur». Un jeune reporter suggère qu’il est sur «une piste sérieuse» qui risque de «faire du bruit»… Une certitude, dans cet univers «JMA» n’a pas la cote. On parle de «pressions» sur les médias. Et de sa manie des procès pour faire taire les critiques. «Ça promet» grogne une vieux briscard de la presse lyonnaise alors que les sondages le donnent favori aux prochaines municipales.

Un «pro Aulas» qui s’est faufilé discrètement dans la salle d’audience tente de dédramatiser : «l’évasion fiscale c’est un droit quand on vit dans un enfer fiscal». Mais s’il perd ce procès ? «Pas grave, plus personne ne croit les journalistes».

                                                                                                            Mardi 18 novembre 2025

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Une croisade cinématographique

 

Difficile de résister à la tentation d’aller voir ce film car il a provoqué un déluge de louanges ou d’anathèmes, sans compter une ex-communication ferroviaire puis marseillaise. «Sacré coeur», évidemment. 

L’histoire ? Pas d’histoire. L’idée c’est de célébrer une religieuse cloitrée, Marguerite Marie, qui a consacré sa vie à vénérer le sacré coeur, il faut le préciser, de Jésus. Avec une série de témoignages, style documentaire : prêtres, religieuses, fidèles.… Regards allumés et sourires béats. 

Mais cette «messe» de 90 minutes glisse aussi dans la fiction. Avec un étrange duo entre celle qui deviendra sainte et un chevelu-barbu nommé Jésus. Ils se parlent, se caressent… Et on a doit en prime à quelques scènes du genre un Christ sur la croix, une couronne d’épine sur la tête, sa mère en pleurs à ses pieds et un soldat romain qui l’achève d’un coup de lance dans… le coeur. 

Le tout ponctué par des images flash de coeurs en flamme. Hollywood low-cost !

Pas de quoi hurler au scandale cependant. Mais plutôt de souligner le coté impudique de ce film limite hystérique qui met en scène, sans finesse, ni profondeur, une foi qui devrait relever de l’intime, voire du mystère. D’autant que cette piété radicale est brandie comme un défi à tous ceux qui, même croyants, habite le camp de la raison. 

 

D’ailleurs ce film très militant se garde bien de raconter la véritable histoire de cette jeune femme. Pas étonnant. 

Née au coeur du XVIIème siècle dans une famille riche et influente, Marguerite Alacoque devient orpheline à l’âge de 12 ans. Adoptée par des parents, elle deviendra leur souffre douleur et tombera gravement malade. Avant d’entrer au couvent à Paray-le-Monial où rapidement elle se distingue par sa grande ferveur. Puis en affirmant avoir des visions d’un Christ avec un coeur enflammé surmonté d’une croix, qu’elle a baptisé son «amant». Elle commence alors à rédiger de longues lettres pour témoigner de son expérience mystique tout en se livrant alors à des exercices de mortification extrêmes, elle lècherait même les plaies des malades, mangerait leurs excréments… Et dans un même élan, elle exige de Louis XIV qu’il consacre la France à son sacré coeur, ce qu’il refuse.

Sa mort à 42 ans provoque un hommage populaire. En revanche, même si on lui attribue plusieurs miracles, l’Eglise reste prudente malgré le mouvement de dévotion qu’elle suscite. Alors que des psychiatres estiment que son cas relève d’un «masochisme» marqué par «une frustration sexuelle»  D’ailleurs il lui faudra attendre plus de deux siècles pour être canonisée après le grand traumatisme de la première guerre mondiale.

 

Mais pas un mot de tout ça dans ce film qui est d’abord et avant tout une croisade cinématographique qui cartonne d’ailleurs dans les beaux quartiers. Mais imaginons le scandale que provoquerait, dans ces mêmes quartiers, un «Sacré coeur» islamiste avec une belle affiche d’un barbu hurlant «Allah Akbar»… Et qui ferait bien sûr un carton dans les banlieues !

                                                                                                         Mercredi 5 novembre 2025

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Un Etranger 

très Camus au fond 

 

Tout le monde a lu «L’Etranger» même ceux qui ne l’ont jamais lu ! Donc tout le monde doit voir le film de François Ozon qui a osé s’emparer du roman d’Albert Camus devenu une icône un peu momifiée en proposant une lecture plus contemporaine. 84 ans après sa parution au coeur de la seconde guerre mondiale.

 

Il n’a pas touché à cette intrigue très sobre qui commence par «Aujourd’hui maman est morte…» ouvrant ainsi un saisissant monologue intérieur. Meursault qui se raconte. Un discret, dans une Algérie française, toute en lumière. Et tout à coup, sur une plage, il tue un arabe, «à cause du soleil». Prison et procès à l’ombre de la guillotine. Mais le jeune homme reste indifférent. Etranger à lui même. Passager de sa vie. 

Le tout soutenu par une écriture «blanche» simple et directe, sans effet. Une révolution à l’époque. 

 

Ozon aurait pu coller une voix off sur une série de cartes postales mais il a tout réécrit, dialogué, scénarisé… Et filmé en noir et blanc. Essentiel car l’esthétique est puissante. Une ville fascinante bercée par la mer, Alger mais tournée à Tanger. Plages et baignades, déjeuners arrosés, robes et chemises légères, cinémas enfumés…

Des acteurs aussi. Meursault interprété par un Benjamin Voisin inspiré, soutenu par des personnages bien sentis : le voisin et son chien, le copain proxénète, le patron du bistrot, sa mère enfermée à l’asile… Et surtout Marie, son amoureuse inquiète, Rebecca Marder.

Toute une époque où les tabous et les conformismes, sont encore nombreux, sexe notamment. 

 

De ce héros qui célèbre l’absurde, Sisyphe en perspective, François Ozon va faire un anti-héros dont l’indifférence le condamne à perdre la tête. Entre ses «je ne sais pas» et ses silences, une liberté qui piétine les autres. Sans mot pour sa victime, «l’arabe» fantôme relégué au rang des accessoires. Annonciateur d’une société aujourd’hui libérée mais introvertie jusqu’à l’absurde.

Avec cet Étranger, ce chroniqueur de l’air du temps, signe un film solide, de la profondeur mais une simplicité radicale qui permet d’accrocher le regard et l’âme. Très Camus au fond. Il aurait sans doute adoré. 

                                                                                                                     Mardi 28 octobre 2025

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Montesquieu
et Sarkozy

Tout sauf un ange ! Mais Sarkozy mérite-t-il de finir en prison ? Lui qui a toujours été un provocateur, a provoqué en tout cas un débat enflammé. Mais surprise, c’est la droite qui matraque la magistrature alors que la gauche la défend. Drôle, car il y a quelques années, c’était l’inverse. C’était l’époque de l’inoubliable «Tribunal des flagrants délire» sur France Inter… 

Cela veut dire que la justice a viré à gauche ? C‘est peut-être plus grave ! 

 

Contrairement aux deux «pouvoirs», exécutif et législatif, consacrés par la Constitution, le judiciaire est considéré comme une simple «autorité» car les juges, eux, ne sont pas élus du peuple. Mais ils n’ont jamais digéré d’être relégués dans cette hiérarchie démocratique.

Après des siècles de soumission au politique, serment à Pétain notamment, cette justice a fini par revendiquer son «indépendance». Mais aujourd’hui, elle veut aller plus loin pour devenir un véritable «pouvoir». D’où son bras de fer avec les élus qu’elle traque avec détermination, n’hésitant pas à perturber certaines élections et bloquer certaines lois.

 

Reste à savoir ce que veut dire «indépendance». Le cas Sarkozy est exemplaire. 

Les syndicats de magistrats répètent «c’est un justiciable comme les autres». Difficile à croire d’autant qu’il les a traités de «petits poids», qu’ils ont manifesté contre lui, sans parler du mur des cons où ils l’avaient épinglé. D’ailleurs on ne juge pas  de la même façon, un enfant ou un adulte, on ne juge pas un fou… Alors un Président de la république !

 

Autre «évidence» répétée par les magistrats : l’exécution provisoire ne remet pas en cause l’appel. Là encore, aberrant. Imaginons que la peine de mort existe toujours en France, elle pourrait alors être exécutée à titre provisoire, en invoquant, comme pour Sarkozy «la gravité des faits reprochés». Pas la peine d’en rajouter. D’autant qu’on imagine la pression de cette exécution sur une Cour d’appel qui aura tendance à ne pas démentir «l’autorité» de la justice. 

 

Révélateur aussi, ce document publié par Médiapart à l’origine de l’affaire. Un faux refusé par le Canard Enchainé. Aucune une enquête n’a été ouverte pour savoir qui a commis ce faux et pourquoi, voire s’il n’y a pas une faute magistrale. Dix ans d’enquête et au final, «aucune preuve» de financement illégal de la campagne électorale de Sarkozy, avouera le tribunal qui va bricoler en urgence avec cette association de malfaiteurs pour faire plonger son présumé coupable. 

Mais les juges répondent très rarement de leurs bavures contrairement aux policiers. Avec de vraies enquêtes, de vrais procès. Non, eux sont «jugés» discrètement devant un Conseil composé essentiellement de magistrats. Une impunité qui renforce leur sentiment d’être infaillible. Et ça peut aller très loin quand ils exigent aveux et repentances de ceux qu’ils accusent. Puis s’insurgent quand on ose les critiquer ! 

 

«Tout homme qui a du pouvoir est porté à en abuser» avouait Montesquieu, lui-même juge, dans l’Esprit des lois, il y a près de trois siècles ! D’où ce principe sacré au coeur de la démocratie : la séparation des pouvoirs. Valable pour les politiques qui ne doivent pas exercer de pression sur la justice. Et pour les juges sur le politique. 

                                                                                                                     Mardi 21 octobre 2025

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Qu'est-ce

que ça veut dire ?  

«Nouvelle vague» aurait pu faire l’ouverture du Festival Lumière. D’autant que ce film raconte « A bout de souffle » qui, au seuil des années 60, a donné un nouveau souffle à un cinéma encore très coincé pour le faire basculer dans la modernité. Et c’est un réalisateur américain toujours surprenant, Richard Linklater, qui célèbre cette révolution.

Inoubliable ce «polar» de Jean-Luc Godard qui met en scène un fait divers, la cavale d’un tueur de flic au coeur de Paris. Avec un duo mémorable, Jean Seberg et Jean-Paul Belmondo. Jeunes, beaux, insolents… Libres !

Avec ses 90 minutes, on se faufile dans les coulisses du tournage. Du casting jusqu’au montage, l’envers du décor. Un spectacle cet ancien critique des « Cahiers du cinéma » qui se retrouve au pied du mur. Son premier film. Sans moyen et c’est sa force, un fil rouge mais pas de scénario, une caméra légère… 20 jours seulement. Une aventure qui va imposer un nouveau style. Un rythme d’abord. Vif et léger. Une seule prise. Des extérieurs sauvages, pas de matériel lourd, une petite équipe engagée, du bricolage souvent. Scènes et dialogues improvisés. On ne joue pas un rôle, on le vit. De la profondeur.

Drôle, captivant, émouvant…

Une performance portée par deux acteurs formidables : Zoey Deutch parfaite et Aubry Dullin, un peu trop pointu mais une belle désinvolture souriante. Pilotés par un Godard très juste, Guillaume Marbeck. Déjà insupportable mais débutant, tranchant mais ouvert, révolutionnaire mais rieur, tartinant des citations obscures, Sartre évidemment. Génial bien sûr !

Toute une époque aussi. Lunettes noires même la nuit et clopes au bec, avec des séquences noyées dans la fumée. Un mot s’impose du début à la fin : « dégueulasse » qui deviendra culte. Tout ça en noir et blanc mais surtout en post-synchro, pas de son enregistré en direct, ce qui donne une vraie préséance à l’image, l’art du muet sonorisé en post-production.

Des scènes mémorables reconstituées : Belmondo songeur qui se caresse les lèvres ou Jean Serberg et ses «qu’est-ce que ça veut dire ?» ponctué d’un sourire fatal. Lui tempêtant dans une cabine téléphonique qui avale ses pièces, elle sur les Champ Elysées vendant le Herald à la criée, mais aussi la bagarre avec le producteur qui craque, le motard flingué… Les voitures américaines et le superbe final avec un traveling en 2 CV où les deux héros, à bout de souffle, vont conclure sur le macadam. Deux regards qui se croisent. Lui rend son dernier souffle alors qu’elle murmure avec son petit accent english « Mais qu’est ce que ça veut dire dégueulasse ?»

«Un film amateur» qui va faire plus de 2 millions d’entrées en France. Et provoquer un débat enflammé. Mais surtout un choc existentielle dans l’univers du cinéma. Jusqu’à Hollywood.

                                                                                                                Mercredi 15 octobre 2025

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Une sacrée famille 

Ils sont au centre de la vie politique depuis un demi-siècle. Et ça méritait bien un livre. «Une famille française», un père et sa fille mais aussi une série de personnages, épouses, soeurs, nièces, amis… La tribu Le Pen évidement racontée par Christophe Bourseiller, qui penche plutôt à gauche mais pas militant. On sent même qu’il est assez fasciné par ce phénomène d’autant plus qu’il a impulsé un Front puis un Rassemblement désormais au seuil du pouvoir. 

 

Essentiel donc d’en savoir plus. Le père d’abord. Un aventurier mais surtout une grande gueule, bagarreur, provoc… Des fêtes délirantes et des repas bien arrosées, chansons à tue tête. Lui a un faible pour les bals costumés. Sa fille Marine préfère les boites de nuit. «Tout est ludique chez les Le Pen» avoue l’avocat Collard.

Homme à femmes, riches si possible, ils est obsédé par l’argent. Avec un couronnement, l’héritage Lambert. Fasciné aussi par la lumière. Prêt à tout pour qu’on parle de lui, jusqu’au fameux «détail». Et dans son intimité, beaucoup de célébrités, souvent cachées. Même Tapie, Chirac et Mitterrand ont cédé à la tentation d’un tête à tête avec le diable. 

Au fil de pages, on découvre des anecdotes surréalistes. Un Jean Marie capable de fraterniser avec des musulmans à Suez et les torturer à Alger. Puis de proclamer que ce sont des vrais français avant de vouloir les jeter à la mer.  Bourré de contradictions, masques et mensonges.

Dans son entourage des collabos et des nazis mais aussi des maffieux comme le parrain de Marine. Tout étant l’ami fidèle d’un anarchiste, avec des relais dans la communauté juive malgré ses dérapages antisémites… Même chose pour sa fille qui navigue d’une promesse à l’autre, sans état d’âme. 

 

Une trajectoire incroyable pour ce duo. Celui qui entre en politique avec un bandeau sur l’oeil gauche survit à tout : trois guerres coloniales, un attentat qui a failli le pulvériser lui et sa famille, sa femme qui le plaque avant de le défier dans Playboy, le putsch de Maigret… Alors que que sa fille harcelée à l’école va affronter son père lorsqu’elle lui succède, la dissidence de son Philippot puis de sa nièce chérie Marion ralliant Zemour… Mais l’un et l’autre ont une formidable résilience.

Ce marginal n’arrive pas à réunir les parrainages pour la Présidentielle de 81 mais il va franchir le deuxième tour, 20 ans plus tard, en ridiculisant la gauche, avec ses 17,6%, avant de céder la place à sa fille. On parie alors sur son échec mais 20 ans plus tard elle se pavane à 41,5%. 

Du ringard Jean Marie à la moderne Marine, une continuité au fond. «Un Front National gentil ça n’intéresse personne» répète le père. La fille prend le contre-pied avec sa dédiabolisation mais en misant sur «les sous-entendus et les non-dits» souligne Christophe Bourseiller. 

 

Un véritable roman pavé de ruptures, scandales et mystères. Roman à clefs où ce journaliste souligne «la complexité» de cette tribu à la fois fragile et résistante. Toujours capable de surprendre.

                                                                                                                            Jeudi 9 octobre 2025

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Un formidable talent 

Remarquable. Pourtant il est passé pratiquement inaperçu, le discours de Jean-Luc Mélenchon à Lille ce samedi. Une heure magistrale. 

Sans note mais pensé, un ton aussi, énergie et simplicité. Le leader des Insoumis a fait une nouvelle fois la démonstration de son talent. Au dessus de la mêlée politique.

Rien que son couplet sur la dette, mérite un Oscar. Il a osé expliquer que ces 3 300 milliards qui affolent tous les experts était «une richesse». En soulignant qu’ils ont permis de construire des ponts, des écoles… Avant d’enchainer sur cette «obsession de l’argent» qui pervertit les élites. Alors que le coeur de la vie, c’est «l’éducation et la culture». Puis il a dénoncé ces privilégiés qui méritent d’être «dégagées» en rappelant que la République a été fondée en 1789, à l’ombre de la guillotine qui a effacé le vieux monde. Pour imposer sa devise liberté égalité fraternité qu’il faut aujourd’hui restaurer. Et que la rue est la seule solution pour redonner le pouvoir au peuple. «Bloquons tout !»

Il s’est même permis de rendre hommage à François Bayrou qui a eu le «courage» de poser la question de confiance !  Dénonçant au passage ses camardes amis socialistes fascinés par les dorures du pouvoir. 

Impossible de ne pas reconnaître que ce réquisitoire enflammé était portée par une sincérité soutenue par des convictions fortes. 

 

Et pourtant… quelques mots l’ont trahi, sur Gaza pour matraquer Israël et flatter les banlieues. Ce qui sonnait faux comme un mensonge au coeur de ce discours inspiré.

De quoi ouvrir les yeux. D’abord sur cette dette sanctifiée, un bout de vérité pour jeter un voile sur l’essentiel, le moteur de cette dette : un déficit budgétaire chronique pour financer non pas des investissements vertueux mais un train de vie délirant, notamment social. Même chose sur l’argent, Jean-Luc Mélenchon est mal placé pour pleurnicher sur les «frigidaires vides», lui qui n’a jamais été ennemi de ses intérêts, bel appartement à Paris, belle résidence secondaire… Millionnaire le révolutionnaire. Pas de quoi lui couper la tête mais au minimum de ricaner. Quant aux obsédés du pouvoir qu’il dénonce, là encore très drôle. Lui obsédé par l’Elysée et qui s’accroche malgré ses bientôt 75 ans. Limite psychiatrie.   

 

Alors on se dit quel gâchis pour la gauche que cet esprit et ce caractère n’ait pas été capable d’entraîner sa famille politique sur un chemin prometteur. Une gauche aujourd’hui sans perspective car elle n’a toujours pas compris pourquoi le mur de Berlin lui est tombée sur la tête. Pas compris que ce marxisme qui l’inspire est fondé sur une hostilité fondamentale à la démocratie, à la liberté, au nom de l’égalité. Mélenchon est trop intelligent pour l’ignorer. Mais il cultive ce virus en soumettant les Insoumis à sa dictature personnelle. 

Un formidable talent. Mais talent trompeur qui ne trompent pas les Français même en colère : il est le politique le plus détesté, par deux tiers des Français qui estiment qu’il est «un danger» pour la France.

                                                                                                              Dimanche 7 septembre 2025

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La question

restera posée

 

Il y a quelques dates clefs dans l’histoire de France. Exemple le 10 juillet 40, vote des pleins pouvoirs à Pétain par le Parlement du Front populaire. Symbole de cette France collabo qui renonce à se battre. Seuls quelques résistants ont osé, De Gaulle en tête. Toujours minoritaires les résistants ! 

Rien à voir mais… le 8 septembre peut devenir également une date historique. Car les politiques ont été incapables de résister aux Français qui défilent depuis des décennies en exigeant toujours plus. A gauche comme à droite. D’où ce mur de la dette.  

Incapables d’avoir le courage de dire non, ça suffit, on ne peut pas continuer à dépenser plus qu’on gagne. Pour une raison simple : quand on est élu, la priorité c’est souvent d’être réélu. Fragilité de la démocratie, surtout quand les élus ont en tête d’abord une carrière, pas une certaine idée de la France. 

Rien à voir mais… on rappellera au passage qu’en 1940, la dette française représentait 160% du PIB. On n’en est pas loin aujourd’hui.   

 

Bayrou ou pas Bayrou à Matignon, ce n’est pas ça qui est important. Mais la question qu’il pose aux députés en leur demandant s’ils sont capables d’avoir le courage, au delà de leur engagement partisan, de s’entendre sur l’essentiel et travailler ensemble pour trouver des solutions et tracer un chemin apaisé vers la prochaine présidentielle. Une coalition des raisonnables autour d’une urgence : assainir les finances de la France. 

Les deux tiers de Français sont pour cette coalition des raisonnables. Plusieurs sondages le confirment, même si les leaders politiques tentent de le faire oublier car au fond ils vivent souvent de cette bagarre. Alors que la plupart des députés penchent du coté de la raison, même s’ils ne peuvent pas le dire publiquement.

Mais les extrêmes qui ont fait de la colère leur fond de commerce, mettent la pression. Complices. A l’extrême gauche pour semer la pagaille. A l’extrême droite pour en profiter et arracher le pouvoir.

 

Ce défi lancé par François Bayrou n’est pas simplement celui de la dette. Mais un choix de gouvernance.

- Soit continuer à cultiver le dogme majoritaire, hérité de la 5ème République, vieux réflexe quasi psychiatrique qui révèle une volonté de domination sans partage. Et de prolonger cette bagarre éternelle, droite-gauche.

- Soit réformer en profondeur cette 5ème République pour accepter une ascèse minoritaire qui exige d’écouter, de débattre et faire des compromis. Avec en perspective la proportionnelle qui imposera une nouvelle culture politique. 

A moins d’un miracle, les extrêmes imposeront leur loi, lundi. Mais la question restera posée, très gaulliste, au fond. Voilà pourquoi le 8 septembre deviendra un jour férié, peut-être !

 

                                                                                                                          Vendredi 5 septembre 2025

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Une exigence

minimum

 

Alors que le premier ministre prépare un budget qui exigera des «efforts», une évidence s’impose pour trouver : remettre à la mode une vertu aujourd’hui totalement ringarde : l’honnêteté. Une inépuisable mine d’or à condition de convaincre les innombrables fraudeurs de se comporter en citoyens responsables. Fraude fiscale au sommet et fraude sociale à la base. Ce qui permettrait de redresser rapidement les comptes de la France. 

 

Exemple les arrêts maladie coûtent 150 millards par an. Presque trois fois le budget de l’Education Nationale. Il ne s’agit pas d’interdire aux salariés d’être malades évidemment mais de combattre les abus. Trop facile de «se mettre en arrêt» avec ou sans maladie.

J’ai dirigé dans les années 2000 un magazine qui a réalisé une enquête simple : envoyer une journaliste en pleine forme demander un arrêt maladie à une vingtaine de médecin en pleurnichant. Résultat un seul n’a pas signé d’arrêt maladie parce qu’il était… absent ! 

Si on faisait simplement 15% d’économie sur ces arrêts maladie en dissuadant sévèrement les faux malades ça permettrait de financer déjà la moitié des fameux 40 millards d’économie nécessaires pour boucler un budget à peu près raisonnable. 

Et on ne parle pas des aides sociales, vitales, mais piratées par des malhonnêtes. Ni du fameux travail au noir qui à lui seul représente plusieurs dizaines de milliards clandestins par an. Sans oublier les deux millions de cartes Vitale frauduleuses.

 

Une honnêteté qui exige non seulement de respecter la loi mais aussi l’esprit des lois c’est à dire de ne pas les contourner. Justement si on fait la chasse aux fraudeurs, il ne faut pas oublier les ultra. Les ultra riches qui s’abritent derrière «l’optimisation fiscale» en pleurnichant eux aussi sur les impôts qu’ils doivent payer. Beaucoup moins en pourcentage qu’un cadre pourtant. 

Voilà pourquoi la fameuse taxe Zucman qui agace la droite Figaro est une bonne piste. Le principe : taxer les 1 800 contribuables français qui ont un patrimoine supérieur à 100 millions. 2% qui rapporterait minimum 20 millards. Mais pas de quoi mettre ces ultra à la rue.

Jeune journaliste économique, souvent au cours d’enquête je me suis heurté à un mur baptisé «holding» perché dans un «paradis» fiscal. 

Pas de pitié pour ces fraudeurs d’autant qu’ils sont les premiers à dénoncer la fraude sociale. En oubliant qu’au sommet une exigence s’impose :  être exemplaire. Surtout quand on donne des leçons.

 

Pour faire accepter ces fameux efforts qui permettrait d’adopter un budget digne de ce nom, François Bayrou doit parler vrai à la base comme au sommet, parler vrai à tous. En convoquant cette exigence d’honnêteté, le minimum pour une société de citoyens responsables. Et pour tracer un chemin :  libérer le budget de ces fraudes qui le plombent et non seulement revenir à une gestion plus saine mais investir ces milliards afin de construire l’avenir.

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Loi du silence 

50 ans déjà. Et toujours un mystère cet assassinat du juge Renaud un 3 juillet à Lyon. Pourtant tout le monde connaît la vérité mais qui ceux savent se taisent policiers, magistrats, journalistes… Politiques surtout.

C’est l’évidence qui s’est imposé jeudi soir au cours d’un débat organisé au Fourviere Hôtel par le fils du juge, Francis Renaud, et son avocat Yves Bismuth Passionnant mais inquiétant ce silence, cette impuissance de la justice face à une vérité qui dérange encore : le magistrat a été assassiné parce qu’il allait sans doute révéler le rôle du SAC, milice politico-mafieuse, dans «le hold-up du siècle» à Strasbourg. Pour approvisionner les caisses du parti gaulliste avec la complicité du gang des Lyonnais.

«La veille de sa mort, au cours d’un déjeuner, il m’a avoué : je risque d’être assassiné» a répété son fils hier soir, la voix toujours nouée par l’émotion et qui n’a toujours pas renoncé à faire la lumière sur la mort de son père. Et il a dressé un véritable réquisitoire contre le silence en soulignant une série d’invraisemblances dans cette affaire.

Exemple : le principal suspect d’avoir flingué le juge est abattu au moment de son arrestation par la police. 27 balles ! Pire, le patron de la PJ qui avait programmé cette opération, était ce jour-là à Paris ! Incroyable aussi ce procureur qui ironise sur le juge assassiné sur les lieux même du crime. Ou encore ce «non lieu scandaleux» qui a définitivement conclu l’enquête judiciaire dans les années 90 prononcé par un juge aujourd’hui médiatique, Georges Fenech suspect au minimum de légèreté, au pire complaisance avec la droite gaulliste qui en fera un député ! Mieux l’avocat chargé de faire appel a déposé sa requête avec 24 heures de retard. Il faut dire qu’il était très occupé par la défense… du gang des lyonnais !

Et les absurdités vont s’enchaîner comme ce préfet qui publiquement proclame qu’on connaît les tueurs mais qu’on ne pourra jamais les arrêter ! Sans oublier ce carton de scellés réunissant les principaux indices qui a mystérieusement disparu. Ou la greffière du juge Renaud jamais interrogé par la police et la justice mais qui a pourtant beaucoup à dire. Elle l’a démontré ce jeudi en évoquant cette perquisition dans son bureau avec là encore une étrange disparition, celle d’un dossier sensible. Ou ce procureur qui a près avoir proclamé à la télévision que derrière toute cette affaire ill y avait «le financement d’un parti politique » va se taire et devenir député… de gauche !

Très survenante d’ailleurs cette gauche au pouvoir qui aurait pu profiter de cette affaire pour enfoncer la droite. Mais qui respectera la loi du… silence, car l’époque, politiques et voyous sont de mèche pour financer les partis. Avec sous le coude quelques dossiers pour dissuader les «balances».

Et bien sûr pas même une petite Légion d’honneur pour pour rendre hommage à ce serviteur de l’État tombé au champ d’honneur. Pourquoi ? Officiellement parce que «les délais sont dépassés» a répondu récemment le ministère ! Et pour faire oublier tout ça «on a détruit le personnage» a dénoncé Francis Renaud en soulignant les caricatures qui circulent encore sur celui qu’on a baptisé le «shérif» fêtard, bon vivant, provocateur… Mais qui était simplement un homme courageux et libre. Donc dangereux.

«Méfions nous de l’oubli» a tonné Me Bismuth. Message à Gérald Damanin pour ouvrir à nouveau ce dossier. Et tirer les leçons de ces rapports incestueux entre justice et politique. La preuve, cette justice qui après après avoir refusé d organiser à Lyon une commémoration au nom de «la neutralité» et de «l’impartialité» s’est contentée, jeudi, au dernier moment, d’un minute de silence au Palais de Justice. Silence toujours !

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Secrets

et mensonges 

Ça commence mal. Premières pages qui annoncent une histoire assez banale. On est même tenté de refermer «Les maisons bleues»… Ce serait une belle erreur car rapidement on est envouté par cette formidable allégorie autour du mensonge. Un signe ? Francesca s’appelle en réalité Françoise, Charbonnier. C’est elle l’auteur. Masque domino qui donne le ton. Une lyonnaise discrète qui mérite la lumière car avec ce roman de printemps, on tient un petit chef d’oeuvre. 

A peine plus de 150 pages. Un exploit aujourd’hui où ça tartine en longueur pour ne pas dire grand chose. Francesca elle, sait faire court, simple et léger pour prendre de la hauteur. Politesse littéraire qui exige évidemment un sacré travail.

 

Victor enfant tombe dans les escaliers. Sept années de coma. Il en sort après avoir hésité à rejoindre ses «ancêtres» car les «terriens», amis et famille, défilent dans sa chambre d’hôpital pour lui parler. Un fantôme qui entend tout. Mensonges en série. 

«Tu peux pas imaginer tout ce que je sais. Les gens parlent quand ils croient que tu ne les entends pas» avouera plus tard ce survivant, mais paralysé, à son voisin Hippo devenu médecin pour le sauver. 

Retour donc au coeur de cette tribu menteuse. Fanny sa mère hystérique, Adam son père transparent, sa soeur chérie, ses deux frères lointains… et des inconnus qui surgissent : la douce Cheyenne d’abord et surtout Jo, chef d’orchestre qui «piège» toute la petite bande avec sa «stratégie maléfique». Beau, fort, intelligent et sympathique. Le charme du mensonge. 

 

Trois générations vont se succéder. Soumis à une loi implacable, celle du silence. Jusqu’à ne plus savoir qui est qui, car une «tache» mystérieuse au bas du dos de certains innocents signe une tromperie transmise de père en fils. Et au final, on est plongé dans une sorte de brouillard où surgissent deux nouvelles figures fascinantes. Tracy et Janis. L’une se moque du mensonge avec sa belle araignée, l’autre joue avec en convoquant son mari disparu. Et elles ensorcèlent Milo, le fils de Victor, lui même surgit d’un coma et accablé à son tour par un lourd secret. 

Le tout rythmé par des rires et des larmes, comme des virgules qui ponctuent cette fiction trop juste pour ne pas être un peu vécue. «Et si nous disions la vérité ?» Le mot est lâché. Mais les silences persistent car parler ce serait faire exploser «une bombe».

 

Un art du suspens sans artifice. Tout en suggestions, de la pudeur. Décor minimum entre Paris et San Francisco, quelques notes de musique, un chat qui se balade, dialogues très nature et terriblement efficaces. Exemple, Milo interpellé par Mila sa cousine amoureuse :
- J’ai confiance en toi mais je dois savoir.

- Savoir quoi Mila ?

- Ce que tu sais que je veux savoir.

Un fragile équilibre qui ne tient que par un fil. Jusqu’à l’épilogue avec un enterrement et une devinette. Un beau roman réfléchi, qui éclaire parfaitement cette époque inquiétante où le faux a pris le vrai en otage.  

Françoise Charbonnier présentera son livre

jeudi 5 juin à 18h-20h au Café 203 / 7 quai Fulchiron Lyon 5ème

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Tout sauf objectif

mais très... honnête !

 

Relu «Hell’s Angels» d’Hunter S. Thomson. Un livre enquête mythique où ce journaliste attaque un sujet sensible : la fameuse tribu des motards qui, début des années 60, sème le chaos en Californie et terrorise l’Amérique. Des « monstres» en Harley Davidson. Crasseux, cheveux longs et blouson de cuir, tatoués, croix gammées, agressifs, souvent bourrés et défoncés… II va les suivre pendant an, en moto et il raconte les virées sauvages, vitesse sans limite, fêtes sans limite, casses, viols et bagarres, «le cauchemar des flics » Mais le public se précipite pour assister au spectacle et les journaux en rajoutent… 

 

Au coeur de ce récit bien ficelé, des portraits sur le vif : Minus, Torpille, Recta, Busard… Et surtout Barger, le chef. Des interviews aussi. «On est des vrais parias rejetés par la société et c’est qu’on veut être. Le monde ne veut pas de nous et nous on ne veut pas de lui». 

De belles séquences moto évidemment. «En  voyant un Hell’s Angel foncer à travers la circulation au mépris de tous les codes, on comprend que la moto est un instrument d’anarchie, un instamment de provocation et même une arme». De l’alcool et de la drogue. Du sexe bien sûr à une époque où la jeunesse commence tout juste à se libérer. 

Hunter les trouvent «plutôt pathétiques» ces rebelles qui se retrouvent dans des bars minables «sans autre espoir que se bagarrer ou se faire tailler une pipe». Ils les jugent durement mais il les défend aussi. Dézinguant un certain nombre de légendes. Avant de se faire casser la gueule. Et de conclure d’un mot «l’horreur !».

 

Un style parlé, simple et direct qui va à l’essentiel. Percutant. Plus d’un demi-siècle déjà mais très actuel. A l’époque, un pavé dans l’univers très conformisme du journalisme où on se savonnait encore avec l’objectivité. Ce qui faisait marrer ce journaliste américain tout sauf objectif. Mais très honnête. Il a même inventé un style : les reportages au long cours où il plongeait dans l’univers qu’il voulait explorer. Immersion totale. Donc pas de distance. Au contraire. Ultra subjectif et il se met en scène. On a appelé ça le journalisme «gonzo»  très factuel, pas de baratin, ni de morale mais drôle et féroce. Parfois un peu délire. Un ton qui libère cette corporation pour tenter autre chose autour de Rolling Stone, le célèbre magazine. 

A l’étroit dans les médias traditionnels, Hunter publiait des livres, toujours très libre, toujours limite. Après son Hell’s Angels, Las Vegas Parano, Rhum Express… Des succès. Passionné d’armes à feu, il va toucher le fond et se suicider. Engagé, trop engagé. Mais révolutionnaire. Un mythe pour ceux qui n’ont pas choisi par hasard ce métier-passion. 

                                                                                                                           Samedi 26 avril 2025

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"Aimez vous les uns

les autres" 

A peine mort, déjà enterré. Beaux discours mais l’essentiel se joue en coulisse alors qu’on prépare ce conclave qui va permettre de désigner le nouveau Pape. Huis clos mais on sait comment ça va se passer :

«Une centaine de cardinaux enfermés à Rome pendant plusieurs jours. Rumeurs, complots, coups bas, haines… et des ambitions féroces. Une bagarre sanglante où s’affrontent des éminences à qui le rouge va si bien. Le tout enrobé dans une belle hypocrisie ecclésiastique, mains jointes, têtes baissées et doux murmures. Des anges !

Superbe décor, avec une belle chapelle Sixtine. Et sacré casting en soutane, tenu d’une main ferme par un doyen qui gère le cirque jusqu’au scrutin final»

Quelques lignes que j’ai mis en ligne en décembre dernier pour résumer le film «Conclave». Avant de conclure : «Drôle de film. Pas vraiment comique, quoique. Un film «simpliste» estimera alors La Croix, le quotidien catho. Logique car ce Conclave signé par Edward Berger s’affranchit des discours tartuffe pour proclamer sans détour une vérité qui agace les fidèles : le Vatican est un lieu de pouvoir, comme un autre, où s’affrontent des idéologies, droite et gauche, mais aussi des égos de toutes les couleurs. Etonnant quand on affiche de beaux principes, du style aimez-vous les uns les autres».

Rien à ajouter. A part que le conclave le plus court a duré quelques heures en octobre 1505. Le plus long qui a démarré en novembre 1268 a duré trois ans. Mais depuis des siècles et des siècles c’est toujours le même cinéma !

                                                                                                                            Mardi 22 avril 2025

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Un sacré pavé

dans une belle vitrine

Un journaliste qui s’attaque à un monument du journalisme. Gilles Gaetner une des figures de l’Express vient de publier un livre (Fayard) sur Edwy Plenel le fondateur de Médiapart. Une lettre ouverte de 268 pages adressée à son «cher Edwy» avec beaucoup de questions du style «qui êtes vous vraiment ?» des conditionnels et des formules habiles, mais un véritable réquisitoire. Tout y passe. Sa jeunesse enragée où «Krasny» son pseudo chez les trotskistes écrit des horreurs dans «Rouge» où il rend hommage, par exemple, aux terroristes palestiniens qui aux Jeux Olympiques de Munich assassinent une dizaine de sportifs israéliens. Et Gaetner ne le lâche pas jusqu’au terme de son parcours journalistique avec ces millions d’euros que cet ex-révolutionnaire toujours syndiqué CGT, va empocher, comme un vulgaire capitaliste, en vendant ses actions Médiapart.

«Obsédé par la chasse aux scoops» au Monde puis à Mediapart. Mais rien à voir avec du journalisme d’investigation, selon Pierre Péan affirmant dans «La face cachée du Monde» que Plenel est en fait une «boite aux lettres» où des juges, des policiers et des avocats glissent des documents compromettant pour régler leurs comptes. D’où une série de faux qui débouchent sur des révélations bidon. La liste est impressionnante. On se demande même si procureur de l’Express n’en rajoute pas. Mais lui même a travaillé sur ces affaires donc difficile à enfumer. Exemple sur le faux sandale à Panama où le PS se serait financé. Bidon comme la maison du Cap d’Antibe qu’un promoteur aurait offert à Mitterand. Pas clair non plus l’acharnement de Plenel dans l’affaire Bettencourt. Ou ridicule mais bien orchestrée le «scandale» des homards servis par de Rugy qui lui coûteront son ministère. Mais le sommet c’est l’affaire Alègre à Toulouse où Plenel se déchaîne sur Dominique Baudis alors patron du CSA qu’il accuse d’avoir participé à des partouzes sado-maso. Sans oublier cette lettre d’un proche de Kadhafi qui lance l’accusation contre Sarkozy du financement libyen de sa campagne présidentielle, là encore un faux.

Une belle collection de dérapages mais jamais la moindre aveu, ni la moindre excuse. En plus il a ses têtes. Dumas qu’il déteste et Villepin qu’il adore comme l’islamiste Ramadan qui finira en prison pour viols. Ce qui lui vaudra la «une» de Charlie Hebdo. Ou encore Darmanin qu’il compare au patron de la police de Vichy et ce faux message de Mandela contre Israël qu’il diffuse.

Et puis il y a cette éternelle bagarre avec le Canard Enchainé, son principal concurrent qui a grillé Médiapart en révélant l’affaire Fillon. D’où la vengeance qui suivra avec la révélation des salaires mirobolants du Canard où on ne cache pas un certain mépris pour Plenel le moralisateur qui se prend un peu trop au sérieux.

En prime on a droit à plusieurs chapitres sévères sur «la dérive» du Monde quand l’ancien trotskiste tenait la rédaction d’une main de fer avant d’être éjecté. Mais suggère Gaetner il a fait beaucoup de mal au fameux «quotidien de référence» qui deviendra plus agressif et militant.

En conclusion Gilles Gaetner interroge Edwy Plenel  : «Ne seriez vous pas resté un révolutionnaire pour qui la chasse aux scoops aurait pour but de faire chanceler les détenteurs du pouvoir ?» Bref un sacré pavé dans la belle vitrine de celui qui cultive son image de «journaliste impartial». On attend avec impatience son droit de réponse !

                                                                                                                                  Jeudi 10 avril 2025

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Réservé aux lyonnais. Tête à tête discret entre le maire écolo de Lyon, Grégory Doucet et l’ancien président de l’OL, Jean-Michel Aulas qui devraient s’affronter aux prochaines élections municipales.

Pas si discret que ça puisqu’un salopard de journaliste enregistrait

cet échange. Délire ? Evidemment.

Même si on sait que le délire habille parfois la vérité.

 

Aulas : T’as vu le sondage, Doucet ? Je suis en tête pour les municipales.

Doucet : Mais enfin président, je suis 5 points devant vous

- Tu vas pas chipoter pour 5 points

- Mais ça veut dire que je vais gagner, président…
- T’emballe pas, les Verts je les ai toujours battus !

- Vous avez quand même quelques casseroles, va falloir gérer ça !

- Mais pas de cuisine sans casseroles. Y compris en politique. Surtout à Lyon !

- Vous n’avez pas peur d’un concert de casseroles si vous être candidat ? Par exemple le Grand Stade, comment vous l’avez décroché ? Pas clair non  ?

- T’as une preuve ?

- Vous voulez que je lâche mon pote Etienne Tête ? Vous vous souvenez, quand il mord ça fait mal…

- Mais c’est un vieux clébard aujourd’hui, pas sûr qu’il puisse encore aboyer !
- Et vous président bientôt 85 ans…

- T’inquiète j’ai un pote à la préfecture qui m’a mis 10 ans de moins sur mon passeport !

- Pas tout jeune quand même

- Mais qui vote, gamin ? Les vieux ! Crois-moi c’est plié tu peux prendre ton vélo et partir en vacances.

- Pas sûr que les vieux votent pour vous surtout si vous faites votre équipe municipale comme à l’OL avec des black et des beurs

- En plus d’être écolo t’es raciste ?

- Mais non, je suis de gauche…

- Et moi je suis écolo parce que j’ai passé ma vie sur les pelouses ! Mais tu me donnes une idée : je vais faire une liste avec des black et des beurs, comme Mélenchon. Avec mes potes footeux. Quand ils sont milliardaires, tout le monde les adorent. Tu vas voir le prochain sondage, je passerai devant toi !

- Facile, c’est vous qui payez les sondages !

- T’as raison c’est plus sûr mais ça coûte plus cher quand on trafique les résultats

- Votre première décision quand vous serez élu ?

- Augmenter le salaire du maire de Lyon

- Mais ça va faire un scandale !

- Je m’en fous je serai élu

- Le fric ça vous obsède…

- Comme tout le monde. La différence c’est que moi je suis riche…

- Ça c’est sûr, vendre l’OL près d’un milliard alors que vous l’avez acheté 10 centimes d’euros…

Sans compter les dessous de table !

- Dessous de table, c’est pas mon genre

- Pourtant il parait que vous aimez bien les paradis fiscaux…

- Fake news, y a un média qui a osé, procès !

- En plus vous êtes pas très net avec les filles…

- Tu parles des call girls à l’OL ? Procès !

- Mais non, je parle de votre nouvelle femme un peu jeune quand même…

- Procès !

- Encore ?

- Oui chaque fois qu’il y a en un qui ose l’ouvrir à Lyon, je lui fais un procès. Et ça marche, les lyonnais sont trouillards !

- Vous avez de la chance que personne vous entende, président !

- En ce moment je leur fous tellement la trouille qu’ils me font tous des turluttes à gauche comme à droite. Noir, Képénékian… Même toi, Collomb tu me soutiens

- Mais vous avez perdu la mémoire, président

- Tu t’appelles pas Collomb ?

- Non moi c’est Doucet Grégory

- Tu cherches à m’enfumer Gérard comme d’habitude ?

- Bon passons, à part augmenter votre salaire, c’est quoi vos priorités ?

- Supprimer les rues piétonnes, les pistes cyclables, les voies de bus, fin des limitations de vitesse, stationnement gratuit partout…

- Vous construisez aussi deux autoroutes sur les quais du Rhône  et de la Saône ?

- Super idée Grégory, tu vois quand tu fais un effort. Allez je te prends comme adjoint au blabla !

Et si on faisait liste commune ? Faut que j’en parle à Tapie !

- C’est votre modèle en politique ?

- C’est lui qui m’a conseillé d’acheter l’OL. Une sacrée bonne affaire en plus je me suis bien marré. A l’époque, il m’avait dit : après tu rachètes la mairie…

- En tout cas la politique ça lui a pas réussi, il a fini en prison

- Mais moi, je suis blanc comme neige
- Ah j’ai compris pourquoi à Lyon on vous a surnommé le menteur
- Et t’as aussi compris que mentir en politique c’est le minimum pour réussir ? Regarde Trump !


Le duo municipal a démenti avec vigueur s’être rencontré.

En accusant l’intelligence artificielle d’avoir fabriqué cet échange comme cette photo !

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Insoumis

jusqu’à son dernier éclat de rire

Hommage à Jean-François Kahn qui vient de mourir. D’autant qu’il a joué un vrai rôle dans ma vie de journaliste. Je l’ai rencontré pour la première fois au début des années 80. Déjà une star, moi jeune reporter, Je m’étais alors pris une sacrée engueulade car je lui avais avoué vouloir «monter à Paris». Après m’avoir traité de «crétin», il s’était lancé dans un réquisitoire enflammé contre le centralisme parisien qu’il fallait combattre en s’engageant en province, «un sacré chantier» vu le niveau des médias. J’ai cédé à son incantation, convaincu.

40 ans de journalisme, jamais Paris ou presque. Un tour de France : Nancy, Toulouse, Marseille… Et Lyon où il est venu soutenir, fin des années 2000, un magazine un peu turbulent, Lyon Mag’, que j’avais créé et qui se battait pour son indépendance. JFK s’est alors félicité de m’avoir engueulé ! En m’incitant à ne pas lâcher.

Un personnage. Curieux, engagé, courageux jusqu’à l’inconscience. Et toujours surprenant. Il pouvait planer dans les hauteurs, histoire et philosophie. Mais il pouvait aussi lâcher des blagues limite débiles ponctuées d’un rire un peu foutraque. Ou s’enthousiasmer pour des chansonnettes, une recette de gras-double…

Toujours passionné mais provocateur avant tout. On se souvient des fameuses couvertures de Marianne, sur Sarkozy «Le voyou de la République» ou sur Dassault «l’empereur tricolore de la corruption». Provocateur non pas pour le plaisir de faire du bruit mais pour mobiliser les esprits et provoquer une réflexion.

Un modèle pour toute une génération de journalistes, dont moi.

Bien sûr, il a parfois dérapé comme après le viol commis par son ami Strauss-Kahn au Sofitel de New York qualifié de «troussage domestique». Et il s’est parfois planté comme sur les Gilets Jaunes qu’il a trop rapidement assimilé à des fachos.

Malgré ses colères et ses excès, il était profondément attaché aux nuances et au pluralisme jusque dans ses propres contradictions que cet agitateur assumait. Incontrôlable évidemment. Un esprit libre, affranchi des convenances, allergique aux modes. Ennemi des extrémistes. Un mépris souverain pour l’argent et une méfiance teintée d’ironie vis à vis des pouvoirs. Deux fléaux pour les médias déjà pris en otage par cette «pensée unique» qu’il a théorisée. Un des derniers grands patrons de presse dans un univers aujourd’hui contrôlé par des grands groupes industriels et financiers.

Tout sauf conformiste. Issu de la gauche mais irréductible dissident dénonçant les staliniens ou les moralistes. Résistant à cette droite réactionnaire ou shootée au libéralisme sauvage.

Ennemi des idéologies. Mais tout sauf neutre. Républicain inflexible. Son concept de «centrisme révolutionnaire» était taillé sur mesure pour lui. Jamais résigné, toujours prêt à s’insurger. Insoumis jusqu’à son dernier éclat de rire.

                             Photo : la couverture du numéro de Marianne rendant hommage à son fondateur

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"Plus grand que la légende"

 

Quelques minutes pour saluer la nomination

de François Bayrou à Matignon.

En soulignant son histoire d'amour avec un roi de France

A écouter  urlr.me/P4HfGY Ou à lire :

-​​

« C’est un ami pour moi, un des seuls amis que j'ai eu dans ma vie et un des seuls qui m’ait donné un coup de main…»

C’est ce qu’a proclamé le nouveau premier ministre, devant l‘ancien premier ministre au cours de la passation de pouvoir dans la cour de l’Hôtel Matignon. Un vendredi 13, 13 décembre, notez bien cette date décisive.

Un vieil ami et même un très vieil ami puisque François Bayrou a dévoilé son nom : Henri IV qui s’il n’avait pas été assassiné par un SDF nommé Ravaillac, aurait eu ce jour-là très exactement 471 ans car né un 13 décembre.

Petit sourire aux lèvres, l’air très fier de sa proclamation, il s’est installé derrière son bureau, bureau régence évidemment. Et première décision, il a commandé un sondage express sur les fonds secrets de Matignon. Futur scandale ? En tout cas, un sondage pour savoir si les Français aiment son pote Henri IV. Réponse quelques heures plus tard : 99% des Français ignorent qui est ce gars là. Jeunes ou vieux, beaux ou moches, riches ou pauvres… Tous unanimes. Et quand on leur précisait que c’était un roi de France, tous unanimes encore pour chanter en choeur «marre des rois». Comme dirait les inconnus «à mort Henri Bâton-Vé !» l’ancêtre justement du fameux Louis Croix-Vé-Bâton, Inconnu également et qui lui aussi mal fini mais en perdant la tête.

De quoi agacer l’ami François qui a piqué sa première en colère avant de prendre une deuxième décision, celle de consacrer son discours de politique générale devant les députés à son ami de 471 ans.

En préparant son speech il a alors sélectionné les points cardinaux sur lesquels il voulait insister. Quatre évidemment. Quatre mots : blanc, messe, vert et poule.

De quoi rafraichir la mémoire de ces français nuls en histoire, a hurlé toujours en colère l’ancien prof devenu ministre de l’éducation.

 

"Paris vaut bien une messe"

Messe d’abord. C’est le fameux «Paris vaut bien une messe» qui ne veut pas dire que Paris ne vaut rien, comme le pense ce provincial militant, béarnais comme Henri. Une tribu du sud ouest réputée têtue.

Non ce «Paris vaut bien une messe» signifie tout simplement que ce roi de France dont le père était catholique mais qui a été élevé par une mère protestante, a décidé pour pouvoir accéder au trône de se convertir. Un retournement de veste salué alors comme pragmatique. Et même magique puisque ça eu pour effet de mettre fin aux guerres de religions, 40 ans de bagarres sanglantes et 2 millions de morts selon la police, au cours notamment de la grande manif de la Saint Barthelemy qui a dégénéré, un génocide selon la CGT.

En tout cas, Henri le néo-catho en a profité pour signer l’édit de Nantes qui autorisait les parpaillots à pratiquer leur religion. Mais trop en avance sur son temps, il a loupé le Prix Nobel de la Paix.

Une messe exemplaire en tout cas pour François Bayrou qui lui rêve de réconcilier la gauche et la droite. En organisant une grande messe au centre.

"Vert Galant"

Vert, c’est le deuxième point cardinal de François, qui sur ce coup est limite mauvaise foi. Car si effectivement le surnom décerné à son vieil ami était «Vert Galant».cela soulignait non pas qu’il était un militant écologiste bien élevé mais un sacré coureur de jupons, limite obsédé sexuel.

Une centaine de maitresses identifiées par Voicy l’ancêtre du magazine Voici. Tout ça confirmé par les historiens qui ont recensé pas moins de 22 enfants de lui. Sans compter les OVNI.

Donc raté cette tentative de François pour séduire les écolos. Quoique chez les chefs écolos d’aujourd’hui il y a de nombreux chauds lapins dont certains ont même fini sur le bucher médiatique.

«Une poule au pot tous les dimanches»

Troisième point cardinal. Poule, rien à voir avec le Vert Galant. C’est la fameuse promesse d’Henri IV de pouvoir manger «une poule au pot tous les dimanches» y compris aux plus pauvres des français. Pionnier là encore mais cette fois de la défense du pouvoir d’achat.

Du coup pour faire face à la demande, son ministre Sully va inciter les agriculteurs souvent en colère à la fermer et à pratiquer une agriculture intensive en répétant «pâturage et labourage sont les deux mamelles de la France». Mamelle ta mère lui aurait répliqué Marine Tondelier la Jeanne d’Arc Verte.

Ça n’a rien à voir mais on en profite pour préciser que Sully le malin a réussi à effacer la dette de la France qui déjà accumulait les déficits sans avoir besoin de la Sécu et des retraites. Contrairement à son successeur Bruno le Maire qui planquait les déficits, lui il y est allé franchement, en déclarant la France en faillite ! Pour ensuite faire un sacré chantage à ses créanciers : soit je vous rembourse la moitié de ce que je vous dois, soit vous ne reverrez jamais votre fric. Et ça a marché !

«Ralliez vous à mon panache blanc»

Autre couleur pour conclure ce quatuor cardinal : Blanc. Une allusion biroutienne au célèbre QCM aujourd’hui oublié : quelle est la couleur du cheval blanc d’Henri IV ? Vraie question en fait car Henri IV avait un cheval qui s’appelait Blanc. Et pourquoi il a choisi de baptiser ainsi son cheval ? Parce que ce roi coquin était obsédé par la propreté. Avec lui, il fallait toujours que tout soit toujours nickel. Ses caleçons comme ses draps ou ses panaches. D’ailleurs sa devise c’était justement « ralliez-vous à mon panache blanc» qu’il lançait à ses soldats sur les champs de bataille.

Blanc, Vert, Messe et Poule. Tout mon programme, pensait le nouveau premier ministre en relisant son discours. Très content de faire la leçon aux députés en étant convaincu d’être ovationné. Y compris par les Ravaillac de la tribu des Insoumis.

Et l’immigration ? C’est la question, s’est alors dit François, qu’allait lui poser une autre Jeanne d’Arc, nommé Marine aussi mais qui risque, elle, le bucher judiciaire. Il a mijoté sa réplique évidemment magistrale en rappelant qu’Henri le guerrier a repoussé de nombreuses invasions avec son panache blanc. D’ailleurs c’était même un obsédé des frontières mais qui n’a jamais hésité à les violer. Bref un vrai centriste !

Bon on arrête. Devant les députés, Henri Bayrou pardon François Bayrou est bien décidé à rendre un vibrant hommage à son roi adoré qui, selon lui, a inventé le centre. C’est à dire l’art de cultiver son propre centre, son nombril.

D’ailleurs il a avoué, ça ne s’invente pas, à Secret d’Histoire : «Henri IV est plus grand que sa légende» avant d’ajouter d’un air coquin «mais il n’y a pas de destin sans légende». Il parlait de lui évidemment.

                                                                                                                                        Décembre 2024

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Pourquoi
tant de haine ?

A peine nommé, il a été le ministre le plus critiqué par la gauche. Traitée tous les noms : escroc, looser, crétin… Et surtout traitre ! Manuel Valls, homme de gauche évidemment. Pourquoi tant de haine ? Quelques minutes pour répondre avec un peu de recul et d’humour. Podcast Philo Décrypte urlr.me/6gcZUw 

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Un jeune crétin

devenu un vieux menteur

«Donald who ?» Il est presque sympas ce Trump junior dans «The apprentice». Presque. Méprisé par son père milliardaire qui l’envoie collecter les loyers dans ses immeubles pourris de New-York. On l’insulte, on lui crache dessus… Et il encaisse. Une bonne tête d’enfant gâté, blond et rond, gavé aux MacDo. Pas même capable de tenir trois verres, ni une conversation sensée. Un peu crétin, amoureux têtu d’une bimbo ambitieuse et qui ressasse un rêve : construire un gigantesque hôtel au coeur de cette ville impitoyable. Absurde selon son paternel. Trump Tower !

Jusqu’au jour où il croise un avocat voyou qui va allumer une flamme au fond de ses yeux bleus. Et lui fixer un cap, «killer ou loser», en lui inculquant quelques règles : «toujours attaquer», piétiner les lois et les gens, ne «jamais avouer»… Le tout couronné par un «Always claim victory !» prometteur. L’élève finira par dépasser le maître avant de s’en débarrasser.

Toute la force de ce film, soutenu par un formidable duo d’acteurs, c’est de raconter tout simplement les préliminaires d’une incroyable aventure. Un réquisitoire implacable contre cette Amérique fric et réac, qui dans quelques jours risque de réélire ce jeune apprenti devenu un vieux clown menteur et brutal.

Vendredi 18 octobre 2024

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                   Majorités absolues

Une sacrée claque. Une calque d’abord pour les commentateurs, dont moi. Une claque aussi pour les sondeurs qui ont fondé la plupart de ces commentaires. Ce qui pose un problème de fond car les sondages et les projections ne sont pas neutres dans un scrutin. 
Tout le monde ou presque avait pronostiqué la victoire du Rassemblement National. Ou dans les derniers jours, une assemblée ingouvernable. Ce qui est le cas avec cette surprise d’un Nouveau Front Populaire en tête. Mais coalition fragile, loin de la majorité absolue. Autre surprise la résistance d’Ensemble, fragilisé lui aussi. Et surprise encore avec un Rassemblement National qui obtient moins de 150 sièges avec 36% des suffrages, mode de scrutin oblige. Affaibli mais qui réalise une progression spectaculaire. 
A qui la faute ? Le président de la République n’est pas totalement innocent ! Même si le job n’est pas facile. Cet admirateur de Machiavel a pris une double claque en pensant que cette dissolution brutale, le remettrai au centre du jeu. Soit avec une victoire du RN et une cohabitation avec Jordan Bardella sous sa surveillance. Raté. Soit une assemblée divisée en trois blocs où il pourrait construire cette coalition droite-gauche dont il rêve. Pas gagné ! 
Cette claque devrait également sonner la planète politico-médiatique. Avec une exigence qui s’impose : réformer un système qui aujourd’hui imprègne les mentalités politiques car seule une majorité absolue permet de gouverner. Alors que la France est aujourd’hui «un archipel» comme dirait l’excellent Jérome Fourquet. Un archipel où chaque sensibilité vit sur son île en défendant son identité, ses intérêts et ses ambitions alors qu’aujourd’hui la seule solution est de travailler ensemble sur la base de compromis. 
Pas facile dans une France où la majorité absolue qui s’impose c’est une majorité contre. 79% contre Macron, 75% contre Le Front Populaire, 64% contre le Rassemblement National… Trois blocs, environ trois tiers. Irréconciliables.
D’où, sauf miracle, une impasse en perspective. Mais on ne va pas avoir le culot de faire des pronostics !
                                                                                                                                Lundi 8 juillet 2024

 
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Une nuit, une vie !

 

Un sacré défi. Thierry Frémaux n’a pas hésité à le relever en se faufilant dans la fameuse série «Ma nuit au musée» des éditions Stock où l’ont précédé de belles plumes comme Lydie Salvayre ou Kamel Daoud. 

Il faut dire qu’il a choisi un territoire familier : son musée Lumière. Un «château» planté dans la périphérie lyonnaise, auquel il a consacré l’essentiel de sa vie. D’ailleurs c’est lui-même qu’il raconte, en se baladant dans ce temple du cinéma des origines. Du Sahara quand, adolescent, il appris à ne plus avoir peur jusqu’au tapis rouge du Festival de Cannes. Son quartier des Minguettes, vélo et judo, Radio Canut et Positif…. Avant d’être embarqué par Bernard Chardère le père de l’Institut. 

«Cinéaste, j’en rêvais. Je n’osais pas» avoue Thierry Frémaux avant d’ajouter «Je me suis dévoué aux films des autres». 

Au coeur de ces 250 pages, une date à retenir, une seule : le 19 mars 1895. Un mardi, où tout a commencé avec le tournage de Sortie d’usine. «Un premier cinématographe a été fabriqué mais les Lumière se disent : le présenter n’est pas suffisant, montrons à quoi il sert». 

Premier film d’où le titre de ce livre. Les frères Lumière surplombent l’histoire du cinéma, explique-t-il, parce que leur cinématographe donne le ton d’un cinéma tourné vers le public. Rien à voir avec la machine à sous très individualiste de l’américain Edison. D’ailleurs, plus qu’un inventeur, Louis Lumière est «le premier des cinéastes».

L’arroseur arrosé, Voltige, Repas de bébé, L’arrivée d’un train à la Ciotat… 1 428 films qui ouvrent un chemin sans fin. Des «vues» qui imposent une règle éternelle : «faire l’imbécile devant une caméra» ! Avec à la clef une exigence : la simplicité.

Magnifique plaidoirie. D’autant qu’il appelle Malraux en renfort pour célébrer «l’invisible permanence de ce qui a triomphé de la mort, ce que nous appelons la culture». En convoquant au fil de pages les grandes figures du cinéma : Mélies, Chaplin, Scorcese, Godard, Felini…

Mais surprise, il achève sa nuit avec la femme de ménage turque qui débarque au petit jour alors qu’il s’est endormi. Elle s’excuse de l’avoir réveillé «en plein rêve». Il la rassure avant de conclure en quelques mots : «Je suis réveillé maintenant mais je rêve toujours». 

Un style sobre, direct. Imagé bien sûr, le mot juste, et toujours un humour pour mettre à distance cette lumière qui aveugle le papillons. 

De «l’atelier» au sommet jusque dans «les sous-sols» cadenassés, une belle balade dans ce Château Lumière. Une nuit, une vie !

Dimanche 1er septembre

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Beau et intelligent 

Magnifique ce "Comte de Monte-Cristo". Un film à la hauteur du fameux roman d’Alexandre Dumas. Long, trois heures, mais pas la moindre longueur.

L’histoire, tout le monde la connait : quelques instants avant de se marier, un jeune marin Edmond Dantès qui vient d’être nommé capitaine, est arrêté. Accusé par des jaloux, cet innocent est embastillé au château d’If. Des années d’enfer. Mais un abbé lui livre le secret d’un trésor et il s’échappe. Devenu riche et puissant, il va alors se venger… Inspiré d’un fait divers retentissant au coeur du 19ème siècle. Et publié en feuilleton, 1 300 pages dans sa version originale !

Un film construit d’ailleurs autour du chiffre trois. Trois traitres qui ont organisé le complot, un procureur un général et un armateur. Trois complices qui vont aider Dantès à leur faire payer cette forfaiture. Trois femmes : la fiancée qui l’a oublié, une fantôme sauvée d’un naufrage et sa mystérieuse filleule. Mais surtout une trilogie qui rythme cette épopée : bref bonheur, enfer interminable et vengeance sans fin. Chaque étape marquée par trois phrases dont celle qui fait basculer l’intrigue : «Ce n’est pas de la vengeance mais de la justice». Une voix off et des dialogues ciselés, merci Dumas. Jusqu’à cet aveu final du héros : «Je suis le bras aveugle de la fatalité».

Costumes et décors superbes, châteaux somptueux et geôles lugubres, paysages splendides. Et la mer immense, ses tempêtes et ses profondeurs, ses frégates et clippers majestueux… Des images saisissantes. Et des comédiens remarquables dont autour d’un Pierre Niney magistral, triple visage du jeune marin, du détenu perdu et du vengeur masqué. Un talent impressionnant.

Alors oui c’est un film classique. Rien à voir avec le cinéma français qui souvent radote avec ces films à message ou qui psychologisent au rabais. Non, pas de génie fumeux. Mais la mise en scène sobre, tout étant très efficace, spectaculaire même, d’un chef d’oeuvre littéraire pour le rendre populaire. Le succès serait largement mérité.

Un film beau et intelligent à voir en famille !

Vendredi 28 juin 2024

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Un miracle qui dérange !

 

Rithny Panh est Cambodgien. Petit fils de paysan, fils d’instituteur. Il a 11 ans, lorsque les khmers rouges prennent le pouvoir. Toute sa famille est éliminée et lui se retrouve dans un camp de rééducation où il assiste aux pires atrocités. Mais il réussit à s’échapper. Thaïlande d’abord. Puis France. A l’époque c’est tout juste si on l’écoute, encore moins on le croit dans les cénacles parisiens qui ont mis des années à reconnaitre l’horreur : Un million et demi de morts. Le cinquième de la population.

Dans les années 80, devenu menuisier, Panh laisse tout tomber pour entrer à l’IDHEC, la fameuse école de cinéma. Et il va consacrer sa vie à témoigner en images. Documentaires, courts puis longs métrages. Plus d’une vingtaine de films. Et une dizaine livres. De retour au Cambodge, il continuera à se battre en créant un centre pour archiver toutes les documents qui accusent.

Aujourd’hui, il ne lâche toujours pas. Avec ce «Rendez-vous avec Pol Pot» qui raconte justement l’aventure d’un trio qui débarque à Phnom Penh en pleine «révolution». Une journaliste, un photographe et un intellectuel maoïste à qui

on a promis un rendez-vous avec «Frère numéro 1». Mais on va d’abord les balader au coeur d’un pays dévasté et martyrisé. Mises en scène et mensonges pour tenter de dissimuler le massacre en cours. «Si vous échouez, on ne pourra plus rêver !» proclame l’intellectuel enthousiaste qui a connu Pol Pot à la Sorbonne. Mais peu à peu ils vont commencer à ouvrir les yeux… Jusqu’à la rencontre avec le dictateur, superbement filmé.

Un film sombre, très sombre, rythmé par des images d’archives en noir et blanc et par un jeu de marionnettes qui symbolise ce voyage au coeur de l’enfer. Villes désertes, ombres et fantômes, rizières peuplés d’esclaves, visages fermés, peur et douleur. Et un silence de plomb percé par les cris des khmers rouges qui mitraillent leur propagande.

Un film qui gêne certains intellectuels aujourd’hui repentis. Car le réalisateur cambodgien, prix du scénario au dernier Festival de Cannes, leur rappelle que dans les années 70 ils ont célébré ce «miracle».

 

Samedi 15 juin 2024

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Uniforme

Une gaffe de la nouvelle ministre aura suffi pour rallumer la guerre scolaire. Privé contre public. Pas sûr que ce soit le vrai problème de l’Education Nationale.

Un certitude c’est la plus grande entreprise française. Et de loin. A coté, les Total, LVMH et autre Danone ne pèsent pas lourd. Rien que le nombre de salariés : plus d’un million ! Même chose pour ses jeunes «clients», 12 millions qui défilent chaque jour dans ses 60 000 «boutiques». Le fameux mammouth.

Sans compter la filiale universitaire. 3 millions de clients et près de 200 000 salariés.

Tout ça coûte cher, de plus en plus cher. 64 millards d’euros l’année dernière. Alors qu’en 1968, on plafonnait à 20 millards de… francs. Vingt fois plus en un demi siècle. Impressionnant là encore. Mais une seule question s’impose : pour quel résultat ?

Un indicateur, cette gigantesque entreprise produit chaque année 600 000 bacheliers. Trois à quatre fois plus qu’en 68. Pas terrible si on compare l’évolution des moyens. D’autant que les experts sont unanimes, ce diplôme a beaucoup perdu de sa valeur. Alors que la moitié des élèves ne savent pas bien lire lorsqu’ils entrent en 4ème, sans parler des mathématiques. Et on ne parle pas des classements internationaux…

La solution ? Compliqué sans aucun doute. Mais déjà, une évidence s’impose : Vous connaissez une entreprise qui a un million de salariés et 12 millions de clients sans que ses 60 000 boutiques aient la moindre autonomie ? Mêmes programmes, mêmes méthodes, mêmes règles…. Tout ça pour faire face à une grande diversité.

L’urgence n’est pas d’imposer un uniforme, mais au contraire d’encourager un peu de liberté. Pour laisser respirer cette entreprise et qu’elle invente son avenir.

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Artificielle

«Le problème c’est le mot intelligence qui n’a pas le même sens en anglais et en français»

Conférence mardi soir à Lyon d’Etienne Klein, physicien et philosophe des sciences. Au programme : l’intelligence artificielle qui fait peur à tout le monde. Pas à lui. Avec humour, il explique qu’en anglais intelligence signifie «collecte et traitement de données» alors qu’en français c’est l’art du raisonnement, analyse, critique… Toute la différence entre comprendre et savoir.

Rien à voir, souligne ce prof à l’Ecole Normale qui raconte comment il a découvert que ses élèves utilisait le ChatGPT pour réaliser leurs devoirs. «Un jour en corrigeant les copies, je me suis aperçu qu’ils faisaient beaucoup moins de fautes d’orthographe mais que leur pensée était identique et plate. J’ai mis 13 à tout monde !»

Pour lui, «l’IA n’est pas intelligente c’est un abus de langage»

Suit une longue démonstration où il appelle Einstein et Galilée à la rescousse pour démontrer que «les théories en disent plus que les données». En clair, c’est le raisonnement, «l’argumentation» qui prime. Et il regrette, que «les cours de physique ont été remplacés par des cours de codage informatique» avant d’ajouter : «que devient la vie de l’esprit dans un monde de clics ? Est-ce qu’on va mieux penser avec l’IA ou penser comme l’IA qui ne pense pas».

C’est un scientifique qui parle. Pas un poète.

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Tous complices !

Un monstre. C’est peut-être le mot qui résume le mieux Gérard Depardieu. France 2 l’a confirmé jeudi soir avec «Complément d’enquête». Un Obelix sans filtre. Tout est énorme chez lui. Sa corpulence, son nez, son rire, sa boulimie, ses blagues… Capable de lâcher les pires énormités. Du genre, «les femmes adorent faire du cheval car elles ont le clito qui frotte sur la selle». Le reste est du même calibre. Pas des images volées au contraire, il proclame tranquillement ces horreurs face caméra. Tout ça au cours d’un séjour en Corée du Nord où il distribue généreusement des mains au cul !

«Des paroles pas des actes» souligne un des rares acteurs à le défendre, en précisant : «même moi il me met des mains au cul».

Alors violeur vraiment, Depardieu ?

Exemple, Charlotte, apprentie comédienne à l’époque. Principale accusatrice, elle assure avoir été violée par Depardieu. Mais elle est revenue le lendemain. Et elle porte plainte après que la star lui ait refusé un rôle. En plus des caméras de surveillance témoignent qu’elle ne semblait ni contrainte, ni forcée. Plainte classée sans suite. Mais elle a re-porté plainte et s’insurge. Etrange témoignage, en tout cas.

En 90 minutes, le procès est tellement impitoyable qu’on a envie de rappeler un détail : Gérard Depardieu est présumé innocent, tant qu’il n’est pas jugé et condamné. Envie aussi de souligner une autre évidence passée sous silence dans cette enquête : tout est énorme chez Depardieu y compris et surtout son talent. Des Valseuses à Cyrano. 200 films, 200 millions d’entrées ! Enorme là encore. Et quand on est hors norme, difficile de rester normal !

Cela ne lui donne pas tous les droits, mais on se demande  pourquoi cette chorale habillée de morale veut à tout prix décapiter ce petit voyou devenu une star, ce prolo de Châteauroux qui s’est imposé au pays des bobos… D’autant que ça fait un demi-siècle que le monstre se balade en liberté. Et tout le monde a supporté ça en silence. Hommes mais aussi femmes. Acteurs, actrices, réalisateurs, réalisatrices, producteurs, productrices, journalistes… Pour décocher un rôle, un interview ou un financement. Tous complices ! Sans doute les mêmes qui hurlent aujourd’hui.

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Pas facile de mourir

Difficile de conclure. Gérard Collomb en est mort dans la nuit de samedi à dimanche. Victime d’un cancer de l’estomac, certes, mais aussi d’un final totalement raté.

On ne va pas rappeler ici son parcours. mais simplement le résumer en soulignant qu’il a réussi alors que ce n’était jamais évident. Quatre étapes surprenantes :

Fils d’un ouvrier et d’une femme de ménage, il a réussi à devenir prof après avoir décroché une agrégation de lettres.

Militant socialiste, tendance Rocard, il va s’obstiner et grimper tous les échelons, jusqu’à devenir député, malgré Mitterrand qui le méprise et le bloque.

Candidat à la mairie de Lyon, il va réussir à se faire élire dans cette ville de centre droit. Trois mandats, une vingtaine d’années.

Ascension couronnée, dernière étape, par sa nomination au ministère de l’intérieur après avoir été un des premiers barons de province à parier sur Emmanuel Macron.

Tout sauf brillant, mais des qualités indéniables. Une volonté, du bon sens, bosseur, un esprit ouvert et modéré…

Mais un an ministre, ça lui suffira pour péter les plombs. Banal quand on franchit un certain seuil. Alors qu’il aurait pu conclure sa carrière en beauté sous les dorures de la République, il va démissionner de son ministère pour tenter un quatrième mandat aux dernières municipales.

Gérard Collomb va se planter magistralement. Et tout Lyon qui aujourd’hui lui rend hommage, va le traiter plus bas que terre.

Ne pas savoir s’arrêter et s’effacer, c’est le redoutable virus qui frappe tous ceux qui exercent un pouvoir, quel qu’il soit. Pas facile car c’est au fond accepter qu’on est mortel. Et facile de refuser cette évidence. Ce qui n’empêche pas de mourir.

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Un serpent

Inquiétante, très inquiétante cette vidéo de Tarik Ramadan sur Youtube depuis quelques jours. Mais il faut reconnaître que ce prêcheur islamiste est habile, très habile. Se présentant comme «islamologue», barbe soigneusement taillée, élégant, voix douce, souriant…. Il parle en choisissant ses mots sur un ton mesuré. Avec en toile de fond, une bibliothèque qui en impose.

Mais pendant 1h30 il va enfiler les mensonges. Exemple quand il suggère que les terroristes qui ont commis le massacre du 7 octobre n’avaient pas reçu cet ordre de la direction Hamas ! Enorme quand on sait qu’on a retrouvé sur des documents sur ces sauvages avec un ordre clair : tuer le maximum de civils israéliens.

Tout aussi incroyable quand il affirme que pendant la dernière guerre, les résistants français se sont eux aussi attaqués à des civils ! En faisant croire que Mandela justifiait la violence face aux injustices. Avec en prime un vibrant hommage à un grand humaniste, Kadhafi !

Pas un mot bien sûr sur les otages sauf pour affirmer que les palestiniens jugés et détenus en Israël sont des «otages». En affirmant qu’Israël était «au courant» et a «laissé faire» pour se poser en «victime».

Bref on en déduit logiquement que les israéliens sont des terroristes. Alors que les palestiniens sont des résistants.

Dans la foulée, il dénonce le lobby juif qui «tient à la gorge» les Etats Unis et l’Europe. Pour conclure à «une grande manipulation médiatique» qui passe sous silence ces «vérités».

Puis tout à coup, regard de velours, Ramadan prend un air grave pour déplorer «les victimes civils» du Hamas, notamment les enfants. Mais il n’osera quand même pas déplorer les viols de femmes, lui qui a été mis en examen pour une série de viols et passé près d’un an en prison, avant son jugement prochain. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir le culot de continuer à minauder des sermons islamistes. Du genre : la France n’est pas un pays de culture judéo chrétienne mais «majoritairement» de culture judéo chrétienne en sous-entendant que cette majorité est en train de basculer ! D’un air menaçant mais toujours en douceur.

Un vrai artiste qui manie avec talent cette fameuse «takia», l’art de la dissimulation encouragé par certains imams. Tout en prudence et nuances mais un véritable réquisitoire contre les juifs et les occidentaux, emballé dans une soi-disante «analyse». Tout ça pour conclure par un appel à «la mobilisation» des musulmans. On imagine l’impact sur les jeunes banlieues. Beaucoup plus dangereux que les imbéciles qui profèrent des inepties sur les réseaux sociaux.

Un serpent !

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Le paradoxe du Loto

Vu le dernier Cash Investigation sur France 2 ciblant «les ultra riches».

Le plus frappant ? Ce ton très agressif de la présentatrice aggravée par la faiblesse de sa démonstration malgré une avalanche de chiffres pour dénoncer l’existence même des «122 milliardaires français».

Pas question de défendre ici certains abus. Notamment les rémunérations ridicules de certains patrons du CAC 40, pas souvent des entrepreneurs et rarement sanctionnés quand ils se plantent.

Mais comment ne pas souligner quelques évidences passées sous silence par Cash. Ces grandes fortunes couronnent avant tout des réussites professionnelles. Fortunes d’ailleurs virtuelles à la merci d’un cours de bourse. En plus, ces fameux riches paient des millards d’impôts, 5 par an uniquement pour LVMH de Bernard Arnaud. 10% de l’impôt sur le revenu ! Et ils créent de la valeur, des emplois, sans parler des innovations, des exportations, des fondations humanitaires ou artistiques… A noter au passage, un grand silence sur certains ultras : les stars du ballon ou de la chansonnette.

Deux exemples assez révélateurs dans ce réquisitoire :

«Le pacte Dutreil», d’abord, qui permet de transmettre son entreprise à ses enfants grâce des allègements fiscaux, dénoncés par cette «enquête» sans même souligner que cela évite à ces entreprises d’être rachetées par des groupes étrangers, faute pouvoir payer les droits de succession. Ça coûte cher, insiste la journaliste. 500 millions. Et l’abattement fiscal-social des journalistes ? 200 millions. Injustice aussi ?

Le plus drôle ce sont ces 35 minutes consacrées aux fameux yachts, un luxe révoltant, images à l’appui. En plus, s’étrangle une voix off, ils peuvent faire le plein hors taxe à l’étranger !

Bref difficile de ne pas avoir la haine contre les ultras après avoir avalé ce Cash. Certes, il y a des riches voyous, comme il y a des journalistes voyous. Mais pourquoi généraliser en entonnant ce petit refrain populiste «mort aux riches» comme certains défilent en hurlant «mort aux flics» ou «mort aux juifs».

De quoi décourager les entrepreneurs, ce réflexe anti-riches ? Pas vraiment, ils sont aujourd’hui plus de 3 millions en France. Avec de nombreuses start-up dont les créateurs risquent de rejoindre le club des 122 mais qui adorent prendre des risques… D’autant qu’ils ne regardent plus la télé !

Et les autres ? «Tout le monde est choqué» répète la présentatrice en suggérant «un risque de soulèvement» contre ces «privilégiés». Et pourtant, paradoxe, des millards sont joués au Loto. 60 depuis sa création par des millions de français qui rêvent de devenir un de ces ultra riches qu’ils détestent !

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Moment rare

Débat ce lundi après-midi à l’Assemblée Nationale sur la situation au Proche Orient. Avec une intervention remarquable. Jean-Louis Boulanges, député Modem et président de la commission des affaires étrangères.

De la hauteur, tout en fermeté et nuances.

Il s’est tout d’abord déclaré «horrifié» par «la violence barbare» du 7 octobre en ajoutant inflexible : «aucune cause politique, même celle du peuple palestinien, ne peut justifier le recours au terrorisme». Et il a insisté : «Israël a droit à la légitime défense. Et en même temps, nous sommes tous sensible à la détresse de Gaza»

Puis il a dénoncé avec mesure la stratégie du premier ministre israélien Netanyahou notamment sa tactique de «soutien» au Hamas qui a «contribué» à ce drame. D’autant plus qu’une «population sans avenir et sans espoir» ne peut pas être attirée par la «modération». Alors que «la solution à deux Etats» est la seule pour «une paix durable».

Mais il aussitôt rappelé que la France est "totalement solidaire" d’Israël et de son "droit à la sécurité».

Au lieu de jeter de l’huile sur le feu, ce vieux militant centriste a préféré jouer la carte du consensus. En concluant visiblement ému : «L’essentiel de cette assemblée est d’accord sur l’essentiel. Beaucoup plus que nous ne le croyons ».

Très applaudi de droite à gauche, parfois debout, y compris par certains Insoumis. Un moment rare, vu l’empoignade permanente à l’assemblée. Mais évidemment pas de faire quoi le buzz alors que ça le mériterait largement.

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«J’ai attrapé la guerre dans ma tête»

Lu «Guerre» de Ferdinand Céline, dont le manuscrit vient d’être découvert 88 ans après avoir été écrit. Feuillets griffonnés, écriture de médecin, parfois difficile à décrypter, que Gallimard vient d’éditer. Premier jet, non relu, ni corrigé par l’auteur du «Voyage au bout de la nuit».

130 pages stupéfiantes où il raconte sa guerre de 14. Blessé au bras et à la tête au cours d’une escarmouche sur le front. «Toute l’oreille gauche était collé par terre, avec du sang, la bouche aussi. Entre les deux y avait un bruit immense. J’ai dormi dans ce bruit et puis il a plu de pluie bien serrée…»

Hospitalisé, décoré… Mais toujours «l’horreur du boucan qui défonçait la tête».

Un style évidemment. Brut, c’est ce qui est interessant car on se glisse dans «l’atelier» de cet écrivain qui s’affranchit des règles. En tabassant les convenances grammaticales : pas de négation, ni d’inversion interrogative, auxiliaires piétinés… On connait la musique célinienne. Mots magiques, mélange de parlé et d’argot. Un rythme aussi.

Une écriture très contemporaine qui a influencé des générations de «scribouillards».

Céline raconte cette «grande» guerre vue d’en bas. Celle du brigadier chef Ferdinand. Vécue. Beaucoup de sexe, de sang, d’alcool…. Toujours à la frontière du rire et des larmes qui se marient dans un cynisme grinçant. Quelques personnages suffisent pour planter le décor de cette convalescence sous les bombardements : son voisin de lit, Cascade le souteneur et sa belle Angèle qui tapine à l’ombre de l’hôpital, son infirmière maléfique Mlle Lespinasse, le pitoyable Dr Meconille, ses parents minables qui se précipitent à son chevet en pleurnichant… Tous de pauvres «cons» que l’auteur accable de son ironie cinglante.

On entre difficilement dans ce vrai faux roman. Le temps de s’acclimater aux provocations stylistiques. Mais c’est une expérience qui permet de sentir le démon qui rode autour de ce génie pris en otage par son talent. Vertige qui lui impose d’aller toujours plus loin jusqu’au délire. En s’affranchissant du sens.

Une phrase, perchée dès les premières pages, le souligne : «J’ai attrapé la guerre dans ma tête». Tout est dit. En annonçant les horreurs dont Céline va tartiner son oeuvre.

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Majorité

Une écrasante majorité des Français est contre. Contre un report de l’âge de la retraite. Logique. Qui peut bien vouloir travailler plus longtemps ? Personne à part quelques illuminés. Tous les sondages le confirment.

D’ailleurs la liste est longue des questions qui provoquent des réponses logiques.

Qui veut payer plus d’impôts ? Qui veut plus d’immigré clandestins ? Qui veut plus d’inflation ? Qui veut plus de délinquants ?

Qui veut moins de médecins, moins de policiers, moins de profs ? Moins d’arbres, moins de vacances ? Personne.

Qui est contre la faim dans le monde ? Contre la maladie ? Contre la guerre ? Contre la mort ? Tout le monde.

Bon on arrête. La seule question que pose ce genre de question est simple : logique d’être pour ou contre un certain nombre d’évidences mais à quel prix ?

Contre la guerre, y compris en collaborant avec le pire des dictateurs ?

Contre les impôts, y compris en exigeant de plus en plus de services publics ?

Contre l’immigration y compris en refusant de faire les boulots qu’ils assurent ?

Contre travailler deux ans de plus y compris si l’espérance de vie a doublé en un siècle. Alors que le nombre d’actifs pour financer un retraité a été divisé par deux en 50 ans.

Quand les sondages posent des questions simplistes, ils obtiennent logiquement des réponses du même calibre.

Reste à savoir si cette logique simpliste doit servir de base pour construire un avenir qui s’annonce complexe.

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Autre siècle

Lu un petit livre, «La côte sauvage», qui vient d’être réédité. Seul et unique roman d’un jeune prodige : Jean-René Huguenin. Né en 1936 et mort à 26 ans dans un accident de voiture deux ans après avoir remporté un immense succès.

On pense évidemment à Radiguet et son «Diable au corps».

«Un véritable écrivain»  proclamait Mauriac. Effectivement. Roman aussi bref que sa vie. 172 pages pour une histoire simple de vacances en Bretagne mettant scène un triangle amoureux, Anne et Olivier frère et soeur fusionnels qui se disputent l’ami Pierre.

Une écriture soignée. Longues phrases, bien construites, rythmées par des dialogues vifs et des retours à la ligne sans majuscule. Mais aussi de belles formules comme ce «Elle ne te regarde pas, elle te rêve» ou encore « Sois tranquille, tu ne brilleras jamais, pour moi, que du coté où je t’éclaire».

Avec rien, un suspens subtil. Ombre et lumière. Tout est suggéré, en finesse. Autre siècle !

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OPA

«Russie, combien de chiffre d’affaires ?» aurait sans doute lancé Kissinger, le champion de la «réalpolitique», si le président des Etats Unis lui avait confié le «dossier» ukrainien.

Rares sont en effet les commentateurs de cette crise qui abordent le problème sous l’angle économique. En préférant disserter sur l’histoire, la géographie… voire la psychiatrique.

Un angle pourtant pertinent car il repose sur des chiffres incontestables. Avec une donnée de base : la Russie est une petite «entreprise». Sa production annuelle de richesses (PIB), environ 1 500 millards d’euros, est équivalent à celle de l’Espagne pour une population trois fois plus importante et un territoire 33 fois plus étendu.

Certes cette PME a des «stocks» importants de gaz, pétrole et minerais. Ce qui lui permet de dégager un «résultat» commercial flatteur quand les cours sont au plus haut. Mais elle est lestée par des «frais fixes» très importants, «investissements» militaires surtout, quatre fois plus que l’Espagne.

D’où l’extrême fragilité de cette «boite» dont le «chiffre d’affaires» par tête lui permet de figurer péniblement à la 65ème place du palmarès mondial derrière le Costa Rica ou la Croatie !

Bref son «pdg» a compris qu’il doit se dégager de cette impasse financière. D’autant que cet ambitieux «manager» rêve de figurer dans le peloton de tête du «CAC 40» comme son collègue chinois. Impossible sans un «bilan» solide pour financer ses «frais fixes» qui explosent.

D’où la stratégie de «croissance externe», très offensive qu’il a adopté. Avec le «rachat» de start-up indépendantes pour quelques kopeck au cours des dernières années : Crimée, Tchétchénie, Kazakhstan… Sans compter de vieux établissements en difficulté : Syrie, Libye, Centre Afrique…

Son modèle : un «groupe» qui pesait lourd au moment de son dépôt de bilan il y a 30 ans : l’Union soviétique et ses 15 «filiales» bien encadrées.

Ses concurrents enragent et le menacent de boycott commercial. Mais, pour le pdg Poutine, cela confirme son sens des affaires. Il a même décidé d’accélérer cette «dynamique vertueuse» en lançant une nouvelle «OPA» : Ukraine, 150 milliards de chiffre d’affaires. L’occasion d’augmenter le sien de 10%. avec une agriculture prospère et un réservoir de matières premières. Sans ce que ça lui coûte trop cher, quelques missiles.

S’il rate son « OPA», cet entrepreneur inflexible risque de se faire éjecter par son conseil d’administration, composé d’impitoyables oligarques. Mais en cas de réussite, il aura dans son viseur d’autres cibles prometteuses.

Reste un problème : la gestion de cette PME en plein développement. Car ce patron formé au management à l’ancienne qui a dépassé l’âge de la retraite, semble négliger les «ressources humaines». Ce qui le rend vulnérable dans un monde de plus en plus concurrentiel où certains utopistes veulent imposer un étrange système baptisé démocratie.

De quoi réfléchir aussi, au coeur de cette guerre économique, sur les stratégies de croissance !

Lundi 16 mai 2022

Dessin
de Bod

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Un sacré pari !

Dans moins d’un mois, la France aura un nouveau premier ministre : Jordan Bardella. C’est l’objectif du Président de la République dont la dissolution, dimanche soir, de l’Assemblée Nationale n’a pas été improvisée. D’autant plus que le résultat de cette élection européenne est tout sauf une surprise avec une extrême droite à 40% qui confirme son score de la dernière présidentielle

Pourquoi cette décision suicidaire ? Pour une raison simple : sans majorité à l’assemblée et contesté dans l’opinion, Emmanuel Macron savait qu’il allait vivre un enfer pendant les trois dernières années de sa présidence. Avec en prime, sans doute, une crise genre gilets jaunes. Un boulevard pour l’extrême droite assurée alors de remporter facilement en 2027 la présidentielle et, dans la foulée, une majorité à l’Assemblée Nationale. Pour entrer triomphalement à l’Elysée et à Matignon, en ayant tous les pouvoirs.

Voilà pourquoi il a décidé d’anticiper ce désastre. En permettant au parti de Marine Le Pen de gouverner la France. Mais sous surveillance. Car le président de la république disposera d’un certain nombre de pouvoirs : diplomatie, justice et défense. Mais aussi nominations, signature des textes de loi, référendum, saisine du conseil constitutionnel… De quoi éviter les dérapages de cette cohabitation avec un gamin de 28 ans. Et surtout de quoi mettre l’extrême droite au pied du mur, en démontrant son incompétence et son impuissance. Ce qui lui fera perde les deux élections de 2027.

Edouard Balladur et Lionel Jospin l'ont compris un peu tard !

Bref, Emmanuel Macron donne la parole au parole au peuple pour lui donner une leçon. Sacré pari politique. Mais vu le personnage, pas très étonnant qu’il le tente.

S’il réussit il entrera dans l’histoire. S’il échoue, aussi.

Dimanche 9 juin 2024

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