Philo Décrypte
Réfléchir sur l'actualité

Pas toujours facile pour les médias d’analyser l’actualité. Car les journalistes sont
souvent obligés de réagir en urgence sans avoir le recul nécessaire alors que les experts, appelés à la rescousse, sont parfois enfermés dans leurs compétences.
Pour tenter de proposer un autre regard, Jean-Noël Dumont, philosophe,
et Philippe Brunet-Lecomte, journaliste, ont décidé de relever le défi. En proposant
chaque mois à Lyon, un moment de réflexion sur un sujet qui domine l’actualité
sous forme d’un entretien, questions-réponses, avec une personnalité.
Pas de la philosophie pure et dure à la grecque. Mais de la distance, un peu de "sagesse" et
de "savoir". Avec une exigence : savoir écouter ceux avec qui on est pas d'accord.
Education Nationale, Ukraine, Europe, immigration, dette française, culture...
Du préfet Didier Leschi au juriste Gilles Martin-Genier, en passant par les journalistes Jean-Marc Daniel ou Mohamed Sifaoui... Ils se sont déjà exprimés devant Philo Décrypte. Des interventions publiques suivies d’un débat qui se déroulent le jeudi entre 12h30 et 14h. Enregistrées et rediffusées en podcast.
Si vous avez en tête un sujet à traiter ou une personnalité à inviter, faites vos suggestions sur l'onglet contact ou sur p.brunetlecomte@gmail.com

Nouvelle saison à la rentrée pour Philo Décrypte
avec toujours des moments de réflexion sur l’actualité
qui s’annonce encore très animée.
Depuis la création de ce cercle en janvier 2024,
une vingtaine d’invités pluriels
et des séquences souvent passionnantes
Dette, justice et politique, immigration, Europe,
Hamas, avenir de la gauche, narcotrafic, Trump…
Alors on continue
en posant toujours des questions un peu provoc !
Et rendez-vous en septembre
avec l’historien Georges Bensoussan
spécialiste l’histoire juive auteur de nombreux livres
dont «Les territoires perdus de la République»
à qui Philo Décrypte demandera
"Qu’est-ce qu’être juif ?"
Jeudi 18 septembre 12h30-14h
au Collège Hôtel 5 place Saint-Paul Lyon 5
Inscriptions sur contact
Participation libre aux frais

La sociologue Dominique Schnapper, élève de Bourdieu et ancien membre du Conseil constitutionnel qui s'inscrit dans la lignée de son père Raymond Aron
Elle répond aux questions de Philo Décrypte pour un podcast estival mais assez magistral
Les démocraties
sont-elles condamnées ?
Auteur d’une vingtaine d’ouvrages sur la démocratie,
la sociologue Dominique Schnapper a accepté un entretien
avec Philo Décrypte pour un podcast estival mais assez magistral
qui accompagne son dernier livre
«Les désillusions de la Démocratie» un véritable cri d’alarme
pointant que les extrémismes menacent
«le système politique le plus humain que la modernité a inventé».
Quatre mousquetaires en ouverture de ces «Désillusions» : Platon, Aristote, Montesquieu et Tocqueville pour défendre la liberté et l’égalité contre les «excès». Alors la démocratie qui repose sur ces deux «piliers» est aujourd’hui tellement fragile qu’elle semble condamnée par les radicalités qui montent dans les opinions, là où elle est née pour conquérir le monde : son berceau européen.
Et difficile d’être optimiste en refermant ce livre. Difficile même de ne pas avouer qu’on est dans une impasse, sans issue à moins d’un sursaut.
Un mot d’abord, sur le style de ces 273 pages. Simple et clair pour un sujet lourd et complexe. Un signe déjà que cette sociologue ne parle pas simplement pour sa chapelle. Logique vu l’importance de cette question qui doit interpeller tous les citoyens.
Un égalitarisme soit «destructeur des singularités»
D’ailleurs, le sens des mots est, pour elle, une exigence préalable avant de plonger au coeur d’une réflexion sans tabou. Un mot clef d’abord, citoyenneté justement qu’elle définit comme la conscience d’appartenir à une «collectivité historique». Pas simplement une identité : langue, religion, territoire, ethnie…. Ni une «uniformisation» mais «un enracinement» qui au lieu d’enfermer permet de reconnaitre la diversité et de la «transcender» dans l’universalité. C’est tout la modernité de cette citoyenneté qui libère mais qui impose de reconnaître l’autre.
C’est aussi l’enjeu pour cette «utopie» confrontée à la réalité. Comment ça peut marcher ? Démocratie représentative répond celle qui a été membre du Conseil Constitutionnel, en précisant que c’est «la seule forme de démocratie qui ai subi l’expérience de l’histoire». Ce qui permet une délégation d’autorité pour dégager non pas un consensus mais une majorité qui respecte les minorités. Minorités dont la tentation est souvent de contester cette démocratie jugée formelle. En exigeant toujours plus de liberté et d’égalité.
Y compris en piétinant les réalités. Exemple, le fameux 13-7-3 que Dominique Schnapper oppose à tous ceux qui disent qu’en France, les inégalités sont de-plus-en-plus-fortes. Or sur la base d’une étude de l’INSEE, elle souligne que les revenus des 10% les plus riches sont 13 fois plus élevés que les revenus des 10% les plus pauvres. Mais cet écart est ramené à 7 si on prend en compte les aides sociales et à 3 en valorisant les services publics. Ce qu’elle appelle des «tensions entre ambition de l’égalité et réalité des différences». Tensions d’autant plus fortes que «c’est quand les égalités diminuent qu’elles deviennent de plus en plus insupportables». D’où cette «passion égalitaire» qui conduit à nier que « les hommes n’ont pas tous les même capacités physiques, intellectuelles…» Avec en perspective, le risque majeur que cet égalitarisme soit «destructeur des singularités».
Une analyse méthodique où perce une inquiétude déclinée tout au long de cet ouvrage : les contestations de la démocratie sont de plus en plus radicales. D’autant plus qu’elle peuvent s’exprimer librement ! Ses détracteurs n’acceptant pas les «limites» nécessaires dans une démocratie «réglée» c’est à dire structurée autour de règles communes et acceptées. Ce qui génère «des indignations à la moindre contrainte» Une démocratie «extrême» qui affaiblit la démocratie et menace même son existence.
Une «dérive» woke contre toutes les injustices
Les signes de cette «démocratie affaiblie» ? Baisse de la participation aux élections, contestation de leurs résultats, polarisation des débats, appels à la rue doublés d’une certaine indulgence pour la violence alors que la légalité n’est plus automatiquement légitime et que se développe une démocratie d’opinion avec multiplication des sondages… Résultat : «le différent politique fait place à la haine». Couronné par l’émergence d’un «relativisme culturel» affirmant que la démocratie n’est qu’une invention occidentale surtout portée par «une supériorité technique». Une critique de la démocratie elle même et non plus simplement de ses dysfonctionnements
Exemples à l’appui, elle pointe cette «dérive» woke contre toutes les injustices : race, genre, sexualité… Pour promouvoir «une victimisation» générale. De la compagnie Luftansa qui proscrit les «mesdames et messieurs» aux physiciens qui refusent de nommer les «trous noirs». Avant d’insister «tous les blancs ne sont pas racistes, tous les hommes ne sont pas dominateurs…» Drapeau de cette cette croisade contemporaine : «le privilège blanc» dénoncé comme «le péché originel». Avec sur le banc des accusés cette colonisation à l’origine de tout. Pourtant, souligne Dominique Schnapper, cette colonisation n’est pas vraiment un particularisme européen : colonialisme japonais en Asie, colonialisme arabe en Afrique… Mais inscrite en profondeur dans l’histoire de l’humanité.
Mais cette exigence toujours plus forte d’égalité conduit à une remise en cause du mérite et des singularités pouvant déboucher sur l’effacement de toute diversité. Et la dilution des responsabilités personnelles. Alors que l’exigence de liberté toujours plus forte conduit à une remise en cause de toute hiérarchie donc de l’autorité, ce qui peut déboucher sur l’anarchie.
Avec deux périls majeurs qui se dessinent dans ces «Désillusions de la démocratie» : une dérive identitaire et une dérive autoritaire.
Perspectives sombres donc, d’autant que les économies libérales étroitement associées à ces démocraties sont aujourd’hui fragiles donc plus capables de générer une croissance pour financer les exigences de «bien être matériel» toujours plus fortes et plus égalitaire. Renforcées par certaines dérives : financiarisation du système, domination de quelques géants des nouvelles technologies…
Mais pour cette sociologue qui a été l’élève de Bourdieu avant de s’en affranchir, le plus grave dans cette radicalisation c’est qu’elle simplifie : «En interprétant toutes les relations sociales selon la seule opposition binaire dominés-dominants, ils évacuent la complexité des relations entre les individus et entre les groupes». Alors que «la complexité permet de rendre compte de la réalité».
Dans la foulée, elle estime que «juger le passé avec les valeurs du présent», relève de «la barbarie» en soulignant qu’on assiste aujourd’hui à un retour du religieux. Notamment aux Etats Unis où la passion éclipse la raison. Et elle cite un auteur qui ne lui pas étranger, puisque c’est son père, Raymond Aron, grand penseur du libéralisme qui déjà au milieu du siècle dernier insistait sur ces «religions séculières» qui prennent en otage le monde, c’est à dire «les doctrines qui prennent dans les âmes de nos contemporains la place de la foi évanouie et situent ici-bas dans le lointain de l’avenir, sous forme d’un ordre social à créer, le salut de l’humanité».
«Une éventualité raisonnable»
«La démocratie pourra-t-elle résister à ses démons ?» s’interroge celle qui a écrit une vingtaine d’ouvrages sur la démocratie en se demandant si «les démocrates sont-ils prêts à combattre» Alors que les dictatures se réjouissent de voire «les démocraties se trahir elles-mêmes» en invoquant la «décadence» et l’impuissance de cet Occident détesté non seulement par les grands pays totalitaires comme la Chine, la Russie, l’Iran… Mais aussi par les pays du Sud Global.
«Le risque de décomposition des sociétés démocratiques» conclut Dominique Schnapper est «une éventualité raisonnable». Ce qui, pour elle, scellerait la fin des «principes qui ont fondé l’Occident depuis le Renaissance» : «la recherche de la vérité, l’esprit critique et la liberté de penser».
Mais comme elle le rappelle au début cet ouvrage «la critique de la démocratie est née en même temps que la démocratie elle-même» pour lui reprocher au fond d’être «trop ou pas assez démocratique». Trop de liberté et pas assez d‘égalité.
Reste la fraternité, le troisième fondement de la trilogie citoyenne. Un mot absent de cet ouvrage. Et ce sera la première question que posera Philo Décrypte à la fille de Raymond Aron qui s’est excusé de ne pas pouvoir venir à Lyon pour parler de ses désillusions. En ironisant sur son «âge invraisemblable» qui souligne son incroyable vivacité d’esprit tout en flirtant avec le siècle. Et une énergie qui lui permet de défendre avec talent « le projet politique le plus humain que, malgré ses manquements, la modernité a inventé».
Ecouter l'entretien de Dominique Schnapper
en cliquant sur l'onglet podcast
Podcasts
Chaque séquence de Philo Décrypte est enregistré pour réaliser un podcast que vous pouvez écouter en cliquant sur l’onglet podcast. Le dernier mise en ligne :
Faut-il déclarer la guerre à l'Algérie ?
Pour répondre à cette question sensible, Piette Vermeren, normalien agrégé d'histoire, spécialiste des pays arabes où il a vécu pendant une dizaine d'années.
Un regard alternatif et argumenté alors que les relations franco-algériennes sont dans l'impasse.
Faut-il avoir peur
de Donald Trump ?
Pour répondre Anne Toulouse, une journaliste franco-américaine qui a crit trois livres sur Trump, dont le dernier «L’art de Trumper».
Un regard original sur le phénomène Trump. Tout sauf politique, encore moins moral. Mais libre. Très américain au fond.
Mai 2025
A quoi servent
les services secrets ?
C’est la question posée par Philo Décrypte à Jean Guisnel un des rares journalistes qui connait bien cet univers qu’il explore depuis près d’un demi siècle pour Libération puis le Point.
Alors nuls ces James Bond français ?
Non répond cet expert qui raconte les ratages mais aussi les réussites dont on ne parle jamais. Du vécu et en plus c’est réfléchi.
Avril 2925
Où va la gauche ?
par François Bazin ancien rédacteur en chef du Nouvel Obs et auteur du "Parrain Rouge" sur Pierre Lambert, le gourou du trotskisme qui a formé de nombreuses figures de la gauche et infiltré partis, syndicats et associations de cette famille politique en la radicalisant.
Mars 2025
A quoi sert l'armée française ?
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Février 2025
Le nouveau SOS de Julien Dray
Fondateur de SOS Racisme, Julien Dray parle du courage et politique. Le jour du refus PS de censurer le gouvernement Bayrou. Alors qu’il vient de publier un livre sévère sur Jean-Luc Mélenchon. Une analyse brillante, ponctuée d’anecdotes surprenantes, de ce Baron Noir très actif dans les coulisses de cette gauche en crise.
Janvier 2025
Narcotrafic de plus en plus violent
et de plus en plus tentaculaire
par Jean-Michel Décugis, grand reporter au Parisien, 30 ans d'enquête sur le terrain. auteur de "Tueurs à gages".
Décembre 2024

Guillaume Ancel, Julien Dray
et Didier Leschi


Justice et politique
par François Falletti, ancien procureur
général de Lyon, Aix et Paris qui analyse
les relations compliquées entre ces deux univers. En évoquant le procès
de Marine Le Pen.
Novembre 2024
Le Hamas dans l’impasse
par Mohamed Sifaoui, journaliste et spécialiste de l’slamisme qui vient de publier un livre sur ce groupe terroriste au coeur
du conflit au Proche Orient
Octobre 2024
Cinéma en coulisses
par Thierry Frémaux, Festival de Cannes et Institut Lumière, qui vient de publier
«Rue du Premier-Film», parle culture et cinéma. Très librement !
Septembre 2024
La dette française est-elle remboursable ?
Polytechnicien et auteur de «L’argent magique» l’économiste Jean-Marc Daniel répond à cette question tabou au coeur
du débat politique
Juin 2024
L’Europe peut-elle mourir ?
Prof à Sciences Po Paris, auteur du livre référence "Quel avenir pour l'Europe"
et consultant LCI, Patrick Martin Genier répond à la veille des élections européennes
Mai 2024
Faut-il avoir peur de l’Islam ? Scientifique, enseignant pendant des années en Algérie puis professeur à l’Ecole Centrale, Guy Stremsdoerfer chrétien engagé qui a écrit plusieurs ouvrages sur l’Islam répond
à cette question sensible
Avril 2024
Faut-il privatiser l’éducation Nationale ?
Philosophe et pédagogue, Jean-Noël Dumont, est bien placé pour répondre à cette question un peu provocatrice. Alors qu’on s’interroge sur l’enseignement public
Mars 2024
Immigration, entre fantasme et déni par Didier Leschi, directeur de l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégra-tion, auteur du "Grand dérangement»
Février 2024
Terre et Guerre,
Jean-Noël Dumont, agrégé de philosophie, inaugure les séquences de Philo Décrypte
en analysant les conflits en cours au delà
des discours guerriers : Ukraine, Proche Orient…
Janvier 2024
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Julien Dray, jeudi 16 janvier au cours de son intervention devant Philo Décrypte
sur le courage en politique, à Lyon au Fourvière Hôtel